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Un an après sa terrible blessure aux JO, Bassa Mawem renoue avec la compétition

Encore un weekend chargé en compétitions… Alors que certains sont actuellement aux Etats Unis pour les World Games (article à venir), d’autres se sont retrouvés sur une étape de coupe d’Europe de difficulté et de vitesse à Žilina en Slovaquie. L’épreuve de vitesse étant terminée, nous avons eu le plaisir de voir le retour de Bassa Mawem à la compétition, avec une belle médaille d’argent à la clé.

Il revient pour nous sur cette compétition, et sur ses objectifs futurs…

Il y a un an je me blessais, il y a 7 mois je pouvais regrimper sur une échelle, il y a 6 mois je pouvais grimper lentement dans la voie de vitesse et il n’y a que 5 mois et demi que je peux grimper au plus vite. Je suis hyper content du rythme de ma reprise et je compte bien continuer d’évoluer vers le plus haut niveau. J’ai toujours dit que je souhaitais arrêter ma carrière au plus haut de mon niveau et c’est bien ce que je compte faire en tentant de prendre ma place aux prochains JO. La route est encore longue pour rattraper le plus haut niveau mondial mais j’y crois, j’y crois car j’ai tellement d’envie et d’énergie à donner à ce projet de vie que rien ne pourra m’arrêter.

Cette année, le plan est de faire uniquement les compétitions importantes pour moi. Championnat de France, Championnat d’Europe Puis la dernière étape de coupe du monde au pays de la vitesse « l’Indonésie » fin septembre.  Mon objectif 2022 est en terme de temps et non pas de classement. Je souhaite pour le championnat d’Europe refaire un run à 5’’45 mon actuel record puis pour l’Indonésie descendre sous les 5’’40. Je veux montrer que je suis solide et rendre fier toutes les personnes que comptent sur moi et me soutiennent.

Pour me préparer au championnat d’Europe je voulais faire une compétition de préparation d’où ma participation à la coupe d’Europe d’Innsbruck. Mais à Innsbruck la compétition ne m’a servi à rien car j’ai fait un faux départ sur mon premier run de Qualif. C’est la raison pour laquelle j’ai pris la décision de faire la coupe d’Europe de Slovaquie avant de rentrer en Nouvelle Calédonie.

Pour entrer dans les détails, la compétition à commencé par mes 2 runs de practice qui se sont mal passés. J’imagine que ça ne s’est pas vu mais le mur était hyper glissant, ce qui m’a empêché de me lâcher sur mes runs. En plein milieu de la voie j’utilise mon pied gauche en adhérence pour me propulser vers le haut et sur ce mur je ne pouvais pas l’utiliser. Très frustrant car mon souhait était de réussir à faire 5’’55. Le côté positif est que j’ai réussi à m’adapter après mes 2 runs de practice pour faire par la suite une belle compétition. Des runs réguliers qui m’ont permis d’aller jusqu’en finale et affronter mon ami espagnol Erik Noya.

J’en profite pour remercier toute ma famille dont ma future femme, Clément l’entraineur de l’équipe de France qui a fait le déplacement juste pour moi et puis tous les membres de l’équipe de France de Difficulté portée par Ben qui sont venus m’encourager tout au long de la compétition. Je transmets toute mon énergie à la diff qui porte nos couleurs en ce moment même sur cette étape de coupe d’Europe Soyez fort la team!

Les résultats des finales femmes

Les résultats des finales hommes

Bassa Mawem nous donne des nouvelles suite à son opération

Il y a une dizaine de jours, Bassa Mawem se rompait le tendon inférieur du biceps durant les qualifications de l’épreuve de difficulté des JO. Mardi dernier, il était attendu à Paris pour se faire opérer à l’hôpital Saint Antoine. Suite à son opération, il est revenu sur sa blessure et nous a donné quelques nouvelles.


Pour revenir sur ce qu’il s’est passé, lors de l’épreuve de difficulté j’ai eu une rupture totale de mon tendon inférieur du biceps, d’où le fait qu’il soit remonté dans le bras. Ce n’est pas simple d’expliquer pourquoi cette blessure est arrivée. Mais je pense que c’est lié au fait que je me suis beaucoup entraîné depuis un an et demi, et au delà ça, que je ne m’étais pas entraîné pour le combiné, je n’avais pas préparé mon corps pour ce type d’effort: moi l’objectif c’était de rentrer en finale en gagnant la vitesse, et aux JO l’intensité était très élevée, et mon corps n’a pas suivi.

Après la vitesse ça allait, j’étais bien, mais après le bloc j’étais exténué nerveusement et physiquement. Et en diff je n’ai même pas eu le temps de grimper, ça a pété très vite. J’ai eu la sensation d’une très grosse crampe, et j’ai regardé mon bras, j’ai vu mon biceps qui était tout en haut et j’ai flippé…

Après ça j’ai été pris en charge par les médecins sur place. 2 options: eux voulaient que j’aille à l’hôpital de Tokyo, mais j’ai préféré aller à la clinique du village olympique. J’ai vu le médecin de la délégation olympique qui m’a mis en contact avec un chirurgien sur Paris, et il m’a dit qu’il fallait que je me fasse opérer dans les 3 semaines suivant la rupture, c’est pour ça que je suis resté sur place pour être avec l’équipe de France pour les finales, être présent pour mon frère et pour Anouck.

Le soir, juste après a diff, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. J’étais hyper déçu, j’étais en finale avec mon frère, on était hyper fiers après l’épreuve de bloc, alors j’ai été super triste de ne pas aller au bout avec lui, on s’était toujours dit qu’on irait au bout ensemble, alors ça à vraiment été dur, j’avais l’impression de l’abandonner en route.

Le lendemain, j’ai encore beaucoup pleuré à chaque fois que je repensais à la blessure, mais pour quelque chose de différent: je pensais à ma carrière sportive qui était remise en cause, tout était remis en question… Je me disais « J’en ai pour 6 mois là, j’ai 37 ans », je ne suis plus trop jeune alors je me posais beaucoup de questions: « Est-ce que j’en suis capable? ». Là concrètement j’ai 6 mois d’arrêt, je vais pouvoir reprendre en février 2022 et ensuite j’ai un an avant les premiers sélectifs pour les JO 2024, et j’aimerai finir ma carrière sur ces jeux. Alors oui j’ai beaucoup pleuré car je n’ai jamais abandonné de toute ma vie, et là pendant une journée j’avais dans la tête qu’il était possible que j’abandonne, je me disais que ma carrière allait se terminer comme ça. Et puis au final j’ai pris la décision de me battre, et quelque soit le résultat final, je veux arrêter sur un combat, ce sera mon ultime combat.

Pour parler un peu de l’opération…

Concernant l’opération, lundi j’étais à l’hôpital Saint Antoine pour voir le Dr Picard qui allait m’opérer, il m’a tout expliqué, il m’a rassuré en me disant que si je respectais le protocole à la lettre, dans 6 mois je pourrai m’entraîner comme avant. Je me suis fait opérer, il était accompagné par les Dr Boutroux et Dr Louis, et je leur dois beaucoup, j’ai été super bien pris en charge, ils se sont supers bien occupés de moi. Je les remercie vraiment, eux et toute leur équipe.

L’opération consistait à refixer mon tendon à un autre endroit sur l’os. Maintenant, en gros j’ai 3 semaines d’immobilisation complète, aucun effort, aucun mouvement et bras à 90°. Ensuite j’ai 2 mois et demi de rééducation pour retrouver ma mobilité (tendre le bras, fléchir, mais sans forcer), et ensuite pendant 3 mois du renforcement pour pouvoir récupérer ma force et faire en sorte que mon tendon soit bien solide. Et au bout de ces 6 mois je pourrai de nouveau chercher à grimper fort. Ça va durer 6 mois, ça va être dur c’est sur, et pendant ces 6 mois je vais faire quelque chose que je n’ai jamais fait, je vais chercher un bon préparateur physique, je me laisse deux semaines de repos et ensuite je reprends l’entraînement. Je vais passer autant de temps qu’avant à l’entraînement mais sans grimper. Je vais bosser les jambes, les abdos, je vais m’étirer, … Je vais faire bosser tout le bas du corps. Je vais changer ma manière de m’entraîner pour tenter de me qualifier en 2023 pour les JO de 2024.

Comment je me sens?

Je ne suis pas au top de ma forme physiquement mais dans la tête tout va bien, je sais quel combat je dois mener, je sais où je vais. J’ai vécu une aventure extraordinaire avec mon frère, je suis super fier d’avoir représenté la France, on était attendu par certains, d’autres pensaient qu’on ne serait pas prêts mais on a prouvé le contraire. Sur ces JO on était d’attaque et on a montré à la France entière qu’on avait toute notre place sur ces jeux.  Donc oui dans la tête ça va super bien!

Un petit mot quand même sur ces JO sans parler de la blessure…

Franchement c’était 3 semaines de folie, les deux premières dans le centre d’entraînement que Sylvain Chapelle avait réservé, puis une semaine sur le village olympique. On a été réçu comme des rois sur le centre d’entraînement, on était dans une bulle sanitaire, on ne pouvait pas sortir de l’hôtel, on restait à notre étage, pas le droit de prendre l’ascenseur, on ne devait avoir aucun contact avec des personnes extérieures. Même pour aller au mur qui était à 5min à pied, on prenait un bus spécial pour ne pas marcher dans la rue. Mais on était dans notre bulle, c’était top, loin de la pression des jeux. Tout était organisé pour que tout soit simple.

Une fois arrivé sur le village on en a pris plein les yeux. Franchement c’est incroyable. Quand tu vis des championnats de France, des coupes du monde, des championnats du monde, tu imagines meme pas à quel point les JO ça va au delà de tout ce que tu as pu vivre dans ta carrière de sportif, c’est démesuré, c’est de la folie. Il n’y a que des athlètes de fou sur le village, c’est une ambiance incroyable. Dans notre chambre on était avec l’équipe de France de pistolet vitesse et l’un des deux (Jean Quiquampoix) à remporté l’or avant nos épreuves, j’ai tenu une médaille dans mes mains, c’était fou, ça te motive tellement à donner le meilleur de toi.

Bassa et son frère Micka devant le mur d’échauffement des JO.

C’est vraiment un autre monde les JO, on ne peut pas se rendre compte tant qu’on ne les a pas vécu. Je n’ai que des choses positives à raconter, et ce que je peux dire à tous ceux qui rêvent des jeux: donnez-vous les moyens car si vous y arrivez vous allez vivre un truc de malade mental, je le souhaite à tout le monde! Quand on est athlète et qu’on donne sa vie pour réussir, c’est la seule compétition qui reflète l’investissement qu’on y met. C’est dingue à dire, mais depuis ces JO je sais pourquoi je me suis entraîné depuis toutes ces années, c’est pour ça, ce moment unique qui restera gravé en moi.

Pour finir, je tenais à remercier tout le monde, la Calédonie, la France, tous ceux qui nous ont suivi sur cette aventure, merci au staff de la FFME qui a été à la hauteur de l’événement, merci tout le monde vraiment, on a vécu un truc de dingue et c’est grâce à toutes ces personnes que cet événement aura été magique.

Bassa Mawem et Victoire Andrier médaillés sur la Coupe d’Europe de vitesse à Gaflenz !

Les compétitions s’enchaînent… Et ne se ressemblent pas ! Au lendemain de la Coupe du Monde d’Innsbruck, de nombreux grimpeurs internationaux se sont rendus à Gaflenz, en Autriche, pour disputer une nouvelle Coupe d’Europe de vitesse. Une journée importante pour les athlètes olympiens, puisque cette compétition de vitesse était la dernière avant l’échéance majeure de l’année 2021: les Jeux Olympiques de Tokyo.

L’équipe de France repart avec deux médailles suite aux performances de Bassa Mawem et Victoire Andrier.

Un nouveau record pour Bassa Mawem, médaillé d’argent !

Alors qu’il réalisait un faux départ éliminatoire dès les qualifications de la Coupe d’Europe d’Innsbruck il y a quelques jours, Bassa Mawem avait à coeur de performer hier sur cette nouvelle étape européenne. Dès les qualifications, le français donne le ton et prend la deuxième place du classement, juste derrière le russe Vladislav Deulin.

Il remporte ensuite un à un tous ses duels de finale, signant même le meilleur chrono des huitièmes de finale. Preuve du niveau relevé sur cette compétition, la moitié des finalistes réalisent des runs sous les 5″60 en quart de finale ! Bassa Mawem atteint la finale et se retrouve opposé au russe Vladislav Deulin. Le bip de départ retenti et les deux grimpeurs s’élancent à une vitesse folle et tous les deux battent le précédent record du monde longtemps détenu par Reza Alipourshena (5″48). Vladislav saute sur le buzzer en 5″41, trois centièmes de seconde avant Bassa, qui signe un run en 5″44, établissant un nouveau record personnel.

Cette compétition était la dernière pour Bassa Mawem avant les Jeux Olympiques.

Guillaume Moro, qui remportait la Coupe d’Europe d’Innsbruck il y a quelques jours, ne parvient pas à réitérer cette belle performance. Après avoir commis des petites erreurs lors des qualifications, il affrontait Bassa Mawem en huitièmes de finale. Malgré un bon run où il réussit à égaler son record personnel (5″74), ce n’est pas suffisant pour remporter son duel face à Bassa. Il termine 9ème de cette compétition.

Enfin, Marius Payet Gaboriaud et Micka Mawem, les deux autres français engagés dans cette Coupe d’Europe, se classent respectivement 22ème et 23ème.

Un podium pour Victoire Andrier

La française Victoire Andrier est montée sur son deuxième podium international hier, décrochant la médaille de bronze. Après avoir pris la 7ème place des qualifications, elle remporte tous ses duels jusqu’en demi-finale, mais malgré un run rapide, ne parvient pas à frapper le buzzer avant son adversaire espagnole. Elle se retrouve alors en petite finale, opposée à la grimpeuse locale Laura Stöckler. Victoire démarre fort et ne laisse aucune chance à l’autrichienne, qui commet une erreur. La française est la première à taper le buzzer et signe au passage un nouveau record personnel en compétition: 8″06. Elle décroche ainsi la médaille de bronze, derrière la russe Iuliia Kaplina, qui remporte l’or en ayant dominé tout au long de la compétition, et l’espagnole Maria Laborda Sagaste.

J’ai retrouvé ma façon de grimper avec mes tripes et ça c’est énorme !!! 🫀⚡Je suis très heureuse de cette troisième place après une année d’entraînement sans compétition où il faut le dire : j’en ai bavé ! Prochaine étape : la Coupe du Monde de Villars 😈🔥⚡ »

Victoire Andrier

Manon Lebon, deuxième française présente sur cette Coupe d’Europe, termine 12ème, après un run très rapide en qualification (8″07).

Un deuxième podium international pour Victoire Andrier.

Les résultats complets

Hommes

Femmes

Interview | Rencontre avec Bassa Mawem, au coeur de sa préparation olympique

Ce jour-là, Bassa Mawem a réussi ce qui semblait presque impossible. Lors du Tournoi de Qualification Olympique, en décembre dernier, Bassa Mawem décrochait son ticket pour les Jeux Olympiques de Tokyo, rejoignant ainsi son frère, Micka, qu’il entraîne et qui était déjà qualifié. L’aventure des Jeux Olympiques, les Frères Mawem allaient la vivre à deux.

Ayant élu domicile en Nouvelle-Calédonie depuis quelques années maintenant, Bassa Mawem, spécialiste de la vitesse, s’entraîne chaque jour sans relâche. Quintuple Champion de France, vice Champion du Monde en 2018, vainqueur du classement général des Coupes du Monde cette même année, le grimpeur de 36 ans a maintenant fait des Jeux Olympiques son objectif numéro 1.

Rencontre avec Bassa Mawem, en pleine préparation pour sa saison 2021. Une année qu’il espère à la hauteur de ses ambitions. Car oui, le français compte bien poser son nom lors des premiers Jeux Olympiques de l’Histoire de notre sport.


Salut Bassa, tout d’abord comment vas-tu ?

Salut, je vais très bien ! Je suis quand même pas mal fatigué parce que je travaille beaucoup, je m’occupe de ma famille, et je m’entraîne énormément. C’est très intense, très dur, du coup mes journées sont vraiment bien remplies.

Comment se passe la vie actuellement en Nouvelle-Calédonie en cette période de crise sanitaire ?

Il n’y a aucun cas de Covid sur le territoire calédonien. Dès le début de la crise en mars, la Nouvelle-Calédonie a fermé ses frontières et a confiné tout le monde pendant environ un mois. Ainsi, en confinant, en fermant les frontières et en déconfinant progressivement, ils ont éradiqué le virus sur l’île et depuis début mai on vit normalement : les salles de sport sont ouvertes, les restaurants aussi, tout est ouvert, il n’y a pas de restrictions, personne ne porte de masque, on vit une vie normale.

La seule chose qui est compliquée c’est pour sortir du territoire. Comme les frontières sont fermées, si des calédoniens veulent sortir de l’île, ce n’est pas sûr qu’ils puissent revenir. Mais je ne me plains pas, je trouve qu’on est plutôt chanceux d’être ici, et la situation est malheureuse pour le reste du monde. J’ai eu la chance de pouvoir faire venir mes parents depuis août. Ça me soulage énormément de savoir qu’ils sont ici, sur l’île, en toute sécurité.

Avec aucun cas de Covid en Nouvelle-Calédonie, la vie n’a rien à voir avec celle en métropole.

Ta dernière compétition remonte au TQO en novembre dernier, quand tu prenais ta place pour les Jeux Olympiques. Avec du recul maintenant, tu réalises l’exploit que c’est de t’être qualifié pour les premiers Jeux Olympiques de l’Histoire de l’escalade, aux côtés de ton frère ?

Le TQO fut ma dernière compétition en date. C’est l’un de mes plus beaux souvenirs de compétition, c’était la cerise sur le gâteau ! Mais d’une manière générale, mon plus beau souvenir c’est l’ensemble de cette année 2019. Une année qui fut très longue et énormément dure pour tous les athlètes, car ce n’était pas facile de faire autant d’étapes de Coupe du Monde, que ce soit en bloc, en difficulté ou en vitesse. En plus de toutes ces étapes mondiales, j’ai participé aux Championnats de France, aux Championnats du Monde, et au TQO pour terminer.

Beaucoup de compétitions donc cette saison-là, c’était vraiment une année où il ne fallait pas craquer et tenir le coup jusqu’au bout. Il y a eu des hauts et des bas, mais même quand on ne se sent pas en forme, même quand on est dans le dur, il faut tenter d’être plus fort que les autres, c’est important car c’est ce qui fait la différence à la fin selon moi.

Le Tournoi de Qualification Olympique a marqué un tournant dans la carrière de Bassa Mawem © Rémi Fabregue – FFME

Il y a eu beaucoup de remises en question sur ma capacité à aller au bout, à réussir, et dans ces moments-là, il faut réussir à se reprendre, pour atteindre les objectifs que l’on s’est fixé. C’est ce que j’ai fait, je me suis concentré jusqu’au bout, je n’ai rien lâché et c’est passé ! Donc oui, c’est clairement ma plus belle année de compète. Avec une fin en beauté lors du TQO qui restera dans les annales ! Avec mon frère on a vécu quelque chose d’exceptionnelle en se qualifiant tous les deux. Déjà quand il s’est qualifié avant moi, c’était déjà quelque chose de très particulier à vivre. La réussite dans la famille, ça procure tout le temps plein d’émotions. Ce jour-là j’étais très ému et très fier de mon frère.


Je m’entraîne sans relâche pour préparer d’abord Tokyo 2021, mais aussi les saisons d’après, car je compte bien continuer jusqu’à Paris 2024, donc ce n’est pas le moment de se relâcher.


Me battre ensuite pour tenter de continuer l’aventure, de poursuivre avec lui, c’était une mission que je me devais de réussir. C’est ce que j’ai fait et ça a payé ! Aujourd’hui je suis fier pour mon frère, fier pour moi, fier pour ma famille et toutes les personnes qui ont cru en nous, d’avoir réussi cette performance. C’est juste la folie. La fédé a beaucoup misé sur les athlètes qui avaient la possibilité de se qualifier pour les J.O, que ce soit du temps, de l’argent, ou du soutien. Du soutien, j’en ai également beaucoup reçu de la part de mon patron, Philippe Bocquet, président de la ligue FFME en Nouvelle-Calédonie. Il m’a énormément soutenu et me laisse m’entraîner sans relâche pour que je puisse atteindre mon objectif, qui est devenu son objectif à lui aussi.

Le jour du TQO, quand j’ai fait mon deuxième run de vitesse, quand j’ai réussi à faire ce qui semblait presque impossible, c’est-à-dire battre mon concurrent de quelques centièmes, je me suis vraiment senti porté par toutes ces personnes qui me soutiennent, par tout le public de Toulouse qui m’a accueilli pendant un mois là-bas (car je me suis préparé pendant plus d’un mois avant le TQO en étant sur place), j’ai pu rencontrer du monde et il y a eu un vrai échange entre les toulousains et moi. Donc un grand merci à toutes ces personnes.

« Réussir l’impossible », Bassa Mawem l’a fait lors du Tournoi de Qualification Olympique à Toulouse © Rémi Fabregue – FFME

Justement, en parlant de compétition, est-ce qu’après cette saison blanche, les compétitions te manquent ? En tant que sportif de haut-niveau, comment vis-tu cette situation ?

Personnellement ça ne me dérange pas trop. J’adore m’entraîner et je profite de ce temps pour le faire. Ça me permet de faire des cycles d’entraînement supplémentaires. Car en temps normal, quand on fait des compètes, notre saison se termine fin octobre, en novembre on se repose de toute notre saison et on reprend l’entraînement en décembre, car dès le mois de mars on se retrouve avec les premiers sélectifs et le Championnats de France, donc on n’a finalement pas beaucoup de temps pour s’entraîner…

Le fait d’avoir une année blanche me permet donc de pouvoir m’entraîner à fond. Et c’est ce que je fais ! J’espère que j’ai la bonne méthode, car je m’entraîne seul, je fais mes propres choix, sur mes planifs, sur l’intensité, sur toutes mes séances. Jusqu’à maintenant ça a toujours fonctionné mais je teste de nouvelles choses, je gère différemment et j’espère que ça va payer. Je m’entraîne sans relâche pour préparer d’abord Tokyo 2021, mais aussi les saisons d’après, car je compte bien continuer jusqu’à Paris 2024, donc ce n’est pas le moment de se relâcher.

Un jour de plus à l’entraînement, un jour de moins avant les J.O

Spécialiste de la vitesse, ton entraînement a dû beaucoup évoluer ces derniers temps. Comment as-tu abordé ce changement ?

Dans ma semaine, je fais 85% de grimpe spécifique en vitesse, 10% de préparation physique, récupération, mobilité et renforcement et 5% de difficulté. Je fais plutôt de la diff, car le bloc, généralement, si j’en fais trop, ça me tasse le dos, donc je préfère faire de la diff et aller dans des voies bien dures. Je dose l’intensité en fonction de ma fatigue. Bien sûr, je ne tente pas de rattraper un Alex Megos, un Adam Ondra ou un Jakob Schubert, car c’est juste improbable. En bloc aussi il y a un paquet de monde, Tomoa Narasaki, Kai Harada, mon frère… Je ne pourrai jamais les atteindre.

L’idée c’est aussi d’arriver aux J.O sans avoir subi de blessure en amont. Deux mois avant d’arriver au TQO, je m’étais fait une poulie partielle, donc je n’avais pas pu faire de diff ou de bloc durant les deux mois avant la compétition. J’étais dégoûté car avant cette blessure, je me sentais fort en bloc et en diff, à mon niveau en tout cas, mais j’ai dû tout arrêter à cause de cette poulie. J’ai continué la vitesse, parce que les préhensions ne sont pas traumatisantes, je strappais mes doigts et je serrais les dents. Donc mon premier objectif, c’est d’arriver à Tokyo 2021 sans m’être blessé en amont. J’essaye de faire très attention et de ne pas reproduire les mêmes erreurs que j’ai pu faire dans le passé. Pour ça, j’ai une équipe de kinés qui me suit 4h/semaine.

Dans le cadre du combiné, Bassa Mawem a intégré des séances de difficulté à son programme d’entraînement © Rémi Fabregue -FFME

Le plan c’est donc de faire en sorte d’être à mon meilleur niveau en vitesse, d’être le plus fort, c’est pour ça que j’axe en grande partie mon entraînement sur la vitesse, pour enlever la place au doute, et derrière l’idée c’est de retrouver mon niveau max en bloc et en diff, c’est-à-dire pouvoir grimper du 8b/+ en diff et du 8A en bloc. Si j’arrive à faire ça, à tout moment il peut se passer des choses…

Donc ma stratégie c’est vitesse à fond ! Surtout que c’est la première fois qu’il y aura de l’escalade au J.O, il y a donc un record à poser et si je peux inscrire mon nom au premier record olympique de vitesse, ça serait un véritable honneur.

Dans cette préparation au combiné, quelle est la principale difficulté auquel tu es confronté ?

Non pas spécialement, il n’y a pas d’imprévu. Je m’entraîne, j’avance, je fais de mon mieux chaque jour à l’entraînement. Il n’y a pas de surprise particulière.

Comment as-tu réagi suite à l’annonce du report des J.O ? Pour toi, pourront-ils avoir lieu cet été ?

Le report des J.O a vraiment été une bonne nouvelle pour moi. Pourquoi ? Car à cette époque, il y avait pas mal d’incertitudes sur les Jeux Olympiques : on ne savait pas s’ils allaient être maintenus en août, on ne savait pas si ça allait être décalé en septembre/octobre 2020, c’était vraiment rempli d’incertitudes. Je suis totalement d’accord avec le fait d’avoir décalé les Jeux d’un an. Lors du premier confinement en mars, toute l’Europe était confinée, mais l’Asie avait déjà passé la première vague, ils n’étaient plus confinés et pouvaient donc s’entraîner de nouveau. Certains n’ont même jamais arrêté de s’entraîner d’ailleurs ! C’est le cas de la Chine, où certaines écoles d’escalade se sont cloîtrées et les grimpeurs ont pu s’entraîner non-stop. Ça n’aurait donc pas été une compétition équitable. Reporter les J.O d’un an était donc la plus sage des décisions, ça a permis aux gens de se concentrer sur leur santé et de laisser un peu de côté l’entraînement, car on parlait bien de notre santé, de notre vie. Dans ce cas-là, le sport passe après.

Concernant le maintien des Jeux cet été, je pense que la compétition va avoir lieu oui. Il y a eu le Championnat d’Europe qui s’est déroulé, ainsi que la Coupe du Monde de Briançon cet été. D’après les dernières informations, si jamais la situation n’évoluerait pas dans le bon sens, les Jeux devraient être maintenus mais il n’y aurait pas de public autre que les japonais. En tant qu’athlète on serait confiné dans le village olympique, donc je n’ai pas d’inquiétude par rapport au maintien des J.O cet été.

Le report des Jeux Olympiques laisse plus de temps à Bassa Mawem pour se préparer © Rémi Fabregue

Comment gères-tu ta préparation et ton calendrier, alors que les prochaines compétitions se font de plus en plus incertaines…?

Avant la crise sanitaire, j’avais décidé de ne faire aucune compétition en 2020. Je déteste m’entraîner en me disant « peut-être, peut-être pas ? », il y avait trop de points d’interrogation. Sur l’année 2021, mon souhait est de faire le Championnat de France fin mars, si bien sûr il se fait et si j’ai le droit de revenir en Nouvelle-Calédonie juste après, sans être mis en quarantaine, car je ne peux pas me permettre ça.

Si les Championnats de France ne se font pas ou si je suis obligé de rester isoler à mon retour, je ne viendrai pas en métropole avant le mois de juin, pour ensuite faire le maximum d’étapes de Coupe du Monde avant les Jeux. Ça me permettrait de retoucher à la compétition avant d’atterrir à Tokyo et faire la plus grosse compète au monde.

Un mot sur la vitesse: la discipline a beaucoup évolué ces derniers temps, avec de nouvelles méthodes, mais aussi de nouveaux records notamment chez les femmes. De ton oeil d’expert, comment vois-tu l’évolution de la discipline ?

Pour moi c’est logique que la discipline évolue. Elle évolue parce qu’il y a de plus en plus de grimpeurs qui font de la vitesse, car c’est plus accessible que le bloc ou la difficulté. Ces deux dernières disciplines demandent énormément de moyens matériels. Pour un petit pays, c’est compliqué de s’équiper d’un gros mur de diff et de renouveler ses prises chaque année, il faut avoir un budget monstre ! La vitesse demande beaucoup moins de moyens, donc cette discipline se démocratise, c’est un accès particulier pour certains pays qui ne sont pas ancrés dans le monde de l’escalade de compétition. L’accès est plus simple et plus rapide. On peut devenir fort très vite. Il suffit de bien s’entraîner, et on atteint un bon niveau mondial, comme un top 20 en Coupe du Monde au bout de 4/5 ans. Contrairement à la difficulté ou le bloc, où il faut avoir commencé très jeune et s’entraîner perpétuellement dans des voies et des blocs variés.


Ça serait bien qu’un jour les gens comprennent que le sport, c’est le sport, quelle que soit la discipline, que ce soit de l’escalade de vitesse, du bloc, du surf, du judo, peu importe ! Un sportif reste un sportif.


La vitesse est très intéressante pour tous les pays : ça ne demande pas un gros investissement et les retombées peuvent être plutôt bonnes. C’est le cas avec l’Indonésie. Ils ont commencé sur un vieux mur, avec un seul set de prises officielles. Mais ils se sont entraînés dur, ça a payé, et maintenant ils ont une structure énorme parce que leur gouvernement a reconnu l’activité grâce aux résultats qu’ils ont faits. Donc ça laisse la place et des pays et des athlètes qui n’ont pas les moyens de s’offrir des structures de bloc ou de difficulté digne de ce nom.

Du coup, la discipline évolue, et les records tombent. Les grimpeurs deviennent de plus en plus forts, de plus en plus coordonnés, de plus en plus experts. Il y a des centres d’entraînement qui se montent en Chine, nous on a le pôle France à Voiron. Il commence aussi à y avoir de l’ancienneté dans la discipline, j’en suis moi-même la preuve: j’ai gravi les échelons, je suis monté, je suis monté, et aujourd’hui je commence déjà à transmettre mes valeurs et mon expérience aux personnes qui m’entourent.

La réussite des grimpeuses asiatiques en vitesse a permis le développement de grosses structures d’escalade, comme ici, à Jakarta en Indonésie.

Tu gères aussi l’entraînement de ton frère Micka, comment cela se passe-t-il ?

Je gère toute la planification de mon frère, je m’occupe de son programme d’entraînement en bloc, en diff et en vitesse. Il fait principalement de la vitesse et du bloc. La diff pour le moment c’est un plus, ça viendra après les Jeux de Tokyo, car il compte se lancer un dernier challenge avec Paris 2024, qui proposera un combiné bloc/difficulté. Mais pour l’instant, ses points forts c’est le bloc et la vitesse, alors on met l’accent là-dessus.

Je fais de mon mieux pour qu’il soit le plus fort possible. En vitesse c’est assez facile de voir quand on progresse, mais en bloc et en difficulté, c’est plus compliqué. Il faut qu’il y ait de la confrontation et pour le moment, vu la situation, il n’y en a pas trop… Mais il a de bonnes sensations, c’est déjà un bon indicateur, donc il va continuer de s’entraîner à fond jusqu’aux premières compètes pour voir réellement tous les progrès qu’il a fait.

Une complicité fraternelle qui fait la force des Frères Mawem.

Si tu devais résumer cette année 2020 un mot ?

Bizarre ! Il n’y a pas d’autres mots. C’était une année particulière, où il a fallu tout revisiter pour aller droit vers ses objectifs.

Et enfin, le mot de la fin est à toi !

Le mot de la fin, je le dédicace d’abord à toutes les personnes qui dénigrent la vitesse. Ça serait bien qu’un jour les gens comprennent que le sport, c’est le sport, quelle que soit la discipline, que ce soit de l’escalade de vitesse, du bloc, du surf, du judo, peu importe ! Un sportif reste un sportif. Un sportif est engagé dans ce qu’il fait, il met beaucoup d’énergie et ça, ça mérite le respect. Tout simplement. C’est un message que je balance à toutes les personnes qui dénigrent la vitesse. Généralement je leur réponds sur les réseaux, pour défendre l’activité, pour défendre notre esprit, pour défendre le sport et les athlètes qui s’entraînent. À ces personnes, je leur demande juste de respecter chaque athlète, quelle que soit la discipline, le genre, la différence. On doit respecter chaque sportif qui s’investit dans ce qu’il aime faire. Point.

Et j’ai un dernier message, pour les jeunes et moins jeunes, les filles, les garçons, et toutes les personnes qui s’entraînent pour atteindre leurs objectifs, que ce soit en bloc, en diff, en vitesse, en falaise, à Bleau ou en compétition: croyez en vos rêves, croyez en vous et arrachez-vous pour y arriver ! La seule chose que vous pouvez faire pour ça, c’est d’essayer, alors faites le à fond, comme ça vous n’aurez aucun regret. Les Frères Mawem sont à fond derrière vous !

Merci à tous, et merci à Planetgrimpe, sans des médias comme vous, personne ne serait au courant de ce qu’il se passe dans le monde de l’escalade, alors merci à vous et à bientôt !

L’objectif de Bassa Mawem: établir le premier record olympique de vitesse © Rémi Fabregue – FFME

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