L’ascenseur émotionnel, vous connaissez ? Lucas Dufros l’a pleinement vécu, dimanche après-midi, en finale des Championnats de France de difficulté.
Dernier compétiteur à s’élancer dans la voie de finale, Lucas zippe du pied sans parvenir à tirer sur la prise que Max Bertone valorisait quelques minutes avant lui. La déception était totale pour le Lyonnais, qui était clairement venu chercher le titre national.
Mais retournement de situation : alors que Max est en pleine interview, on apprend de la part des juges que le Réunionnais aurait malencontreusement laissé traîner son pied sur une plaquette… Ce qui le relègue à la septième place des finales. Contre toute attente, c’est donc le jeune Lucas Dufros qui s’offre le titre de Champion de France de difficulté 2024, pour son plus grand bonheur !
Nous l’avons rencontré afin qu’il nous explique la manière dont il a vécu la compétition, l’ascenseur émotionnel qu’il a connu quelques minutes après les finales et ses prochains objectifs.
Lucas, comment te sens-tu après ton titre de Champion de France ?
Ce sont de nombreuses émotions qui se mélangent, ça a été un véritable ascenseur émotionnel ! Mais je suis avant tout heureux que tout le travail entrepris depuis le début de la saison paye enfin. Réussir à poser ma grimpe au moment voulu est vraiment une fierté. C’est un rêve qui se réalise et une revanche qui est prise sur ma troisième place d’il y a deux ans. Maintenant, je vais tout donner pour que la suite soit encore plus belle.
Raconte nous ta compétition.
Dans l’ensemble, je pense que la compétition pouvait difficilement moins bien se passer. Ça a démarré avec des qualifs où je suis passé tôt dans la Q2, en troisième position. Une voie dans un style que j’affectionne, avec une fin plutôt rési dans laquelle j’ai réussi à bien m’exprimer en tombant à deux mouvs de la fin (à cause d’une erreur de placement). La Q1 s’est aussi bien passée, dans un style plus physique, même s’il y a eu un peu de frustration avec une zipette de la main un peu inattendue.
Je terminais donc deuxième des qualifications : parfait pour être placé, mais sans passer dernier en demi-finale. J’étais dans la peau du chassé et pas du chasseur. Pour ce second acte, ça n’a pas été simple de rester focus sur moi en isolement… L’ambiance dans la salle donnait l’impression que chaque grimpeur topait la voie ! J’ai quand même réussi à m’exprimer dans cette demi-finale, avec un début facile et des difficultés marquées, où ça tombait par paquets de grimpeurs. Avec le rétro classement, je terminais donc premier.
Pour la finale, j’ai su à la lecture que le style me conviendrait. J’ai tout de suite pensé à une chose : je voulais à tout prix toucher les dernières prises de la voie. Après un début où il fallait rester appliqué et un gros repos, on enchaînait sur une section intense et résistante, où je me suis fait avoir sur une montée de pied… Mais finalement, je suis heureux de ma grimpe et de l’état d’esprit affiché tout au long des quatre runs du week-end.
© Aurèle Bremond
Peux-tu revenir sur ta finale plus précisément ?
En finale, je suis arrivé avec la hargne de casser la voie, sûr de mes forces et sans aucun stress. Je n’avais jamais ressenti cette sensation de confiance avant une finale. Cette volonté de réussir la voie avant tout a failli me coûter le titre, mais la fin est finalement belle. Encore une fois, l’ambiance que l’on entendait depuis l’isolement brouillait les pistes sur là où les autres arrivaient à aller, mais j’ai réussi à m’en servir pour m’imaginer toucher le relais.
Juste après ta finale, tu semblais très affecté de ne pas avoir gagné, c’était ton objectif principal ?
Oui, c’était très dur… J’ai tout de suite senti que ça allait pouvoir se jouer à un rien (en l’occurrence un +), et malheureusement, en ma défaveur. Après ma troisième place au Championnat de France de Laval en 2022, où j’étais vraiment sur un nuage et où je m’étais imaginé gagner, je m’étais promis que je prendrais ma revanche en allant chercher le titre. C’était un objectif clair dans ma tête.
Mes résultats très décevants de l’année dernière n’ont fait que décupler mon envie, et échouer de nouveau à la deuxième place (je l’avais déjà fait quand j’étais en cadet) à cause de mon envie de casser la voie plutôt que jouer le +, aurait vraiment été un coup dur ! Même si ce n’est que le début de la saison, lorsque l’on vise l’international, le Championnat de France a une valeur très particulière. Donc oui, clairement, c’était un objectif majeur de ma saison, qui devait ensuite m’aider à me projeter sur l’international, qui reste l’objectif le plus important à moyen et long terme.
© Aurèle Bremond
Finalement, tu remportes l’or car Max Bertone se fait reléguer suite à un appui sur une plaquette, comment as-tu vécu tout cela ?
Ça a été très difficile émotionnellement car pour moi c’était fini, tout s’effondrait pour cette compète jusqu’ici rêvée et il allait falloir se promettre à nouveau de revenir dans un an pour ne pas finir fanny sur cet événement que représente le Championnat de France. J’ai donc d’abord cru à une blague lorsque des amis me l’ont annoncé avant que la décision s’officialise.
Mais je tiens à féliciter Max, je suis vraiment triste et désolé que ça se termine comme ça pour lui. Dans un premier temps, j’ai bien vu qu’il avait du mal à profiter de sa première place provisoire alors que c’était le jeu de la compète et qu’il avait mieux joué le jeu que moi dans l’engagement du mouvement clé. Il a montré à tout le monde son niveau, même si personne n’en doutait réellement, et c’est certain que l’avenir lui appartient du haut de ses 17 ans.
Je pense qu’on s’est poussé mutuellement, dès l’isolement, de manière très saine, à donner toujours plus que l’autre dans cette finale. Donc j’ai hâte de la prochaine bataille sur le mur avec lui et tous les autres grimpeurs car on a vraiment la chance d’avoir une densité exceptionnelle en France, qui nous force à tout donner dans chaque run pour ne pas passer à la trappe. Je pense donc qu’il va me falloir un petit peu de temps pour réaliser ce titre, mais c’est un rêve qui se réalise enfin après des périodes pas toujours faciles.
© Aurèle Bremond
Quelle est la suite pour toi ?
La suite la plus proche va être le sélectif Équipe de France dans trois semaines, où j’espère rééditer le résultat de ce week-end sur un mur au profil différent. Ensuite suivront les compètes internationales, mais dont le nombre dépendra des choix qui seront faits, indépendamment de ma volonté. Mais c’est clairement cette partie de la saison qui m’anime depuis des mois et j’ai hâte d’aller y jouer.
Un dernier mot à ajouter ?
J’aimerais en ajouter deux. Tout d’abord merci à toutes les personnes (famille, amis, etc etc.) qui m’ont poussé et soutenu de près ou de loin, sans qui rien de cela ne serait possible. Et enfin, comptez sur moi pour tout donner pour la suite ! Ce titre, c’est un objectif de coché, mais ce n’est qu’une étape…
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