Jules Marchaland nous parle de son premier 9a, « Trip Tik Tonik »
Le 14 mai dernier, Jules Marchaland enchaînait Trip Tik Tonik dans les Gorges du Loup. Cette voie sur pinces cotée 9a et déversante à 60°, constitue le premier enchainement dans le neuvième degré du grimpeur niçois de 20ans.
Tu viens d’enchaîner ton premier 9a. Quel est ton ressenti ? Tu réalises ?
Ça fait un moment que j’attendais de passer le cap du 9eme degré. Je savais que j’en étais capable mais je n’arrivais pas à concrétiser. C’était vraiment le bon moment pour enchaîner Trip Tik Tonik. J’attaquais un gros chantier de 10 jours sous le soleil bien violent le lendemain, donc grosse fatigue et impossible d’aller à la falaise. Après 10 jours je réalise que c’est fait, et je suis vraiment satisfait et soulagé d’avoir croité.
Pourquoi avoir choisi Trip Tik Tonik comme premier 9a ?
Trip Tik Tonik c’est un peu la ligne de rêve de chez nous (vers Nice) : des colos dans du gros dévers, tout naturel, pas loin de la maison. Tout est parfait dans la voie, les mouvs sont tellement classes !
En 2017 tu as enchaîné tes deux premiers 8c+. Tu as attendu 2021 avant d’en réenchainer un et 2022 avant d’enchaîner ton premier 9a. Comment expliques-tu ce long processus de progression ?
Entre 2017 et 2021 je n’ai jamais vraiment arrêté de grimper. Je faisais encore les compétitions, mais j’arrivais un petit peu moins en forme au moment de la saison en falaise, et je me faisais rouster dans les voies qui me restaient à faire ; c’était dur mentalement. J’ai donc préféré profiter de l’été avec mes potes plutôt que d’aller poncer la falaise…
Comment fais-tu pour grimper à haut niveau tout en exerçant ton travail de constructeur de scènes/structures d’événements ?
Mon travail me laisse beaucoup de temps libre. J’ai le statut d’intermittent et il n’y a pas énormément de boulot de septembre à mai. Ça me permet de pouvoir m’entraîner assez souvent. Seul bémol, la période la plus remplie de travail c’est l’été… J’essaye de faire au mieux pour trouver un juste milieu entre le travail et l’escalade et essayer de bien gérer la fatigue.
Quels sont les sacrifices à faire / l’entraînement pour atteindre un tel niveau de grimpe ?
Pour moi il n’y a pas de sacrifices obligatoires à faire, mais selon l’hygiène de vie des grimpeurs certains sacrifices peuvent être vraiment bénéfiques, c’est sûr. Pour ma part, je me suis beaucoup plus entraîné cette année. Je suis passé de 3-4 séances à plutôt 6-8 séances par semaine. Je n’ai pas de planning précis d’entraînement. Je m’entraîne quand j’en ai envie et quand j’ai le temps. J’ai aussi arrêté de manger des kebabs, pizza, mcdo et sucreries depuis 1 mois, et j’ai perdu 3 kg assez facilement ; je pense que ça m’aide vraiment. La clef pour la performance c’est l’entraînement !
Peux-tu décrire la voie et son crux ?
La voie commence par 10-12 mètres dans un panneau à 60°, cette partie doit valoir 8b/8b+ sur de belles pinces. Après ça, il y a un léger genoux où on peut à peine délayer, puis on attaque le crux. Quatre beaux mouvements sur pinces, jusqu’à atteindre ce ballant mythique avant d’aller dans une bonne prise; suivent une dizaine de mouvements pas très durs pour rejoindre un bon repos. Et la fin doit valoir 8a+ ou 8b sur de belles colos dans un dévers moins prononcé qu’au début
Quel était ton état d’esprit en rentrant dans le 8b rési qui suit le crux ?
J’étais vraiment déterminé à la plier, mais j’avais vraiment peur de l’échec et une bonne montée de stress est arrivée… C’est un peu ma spécialité de me la coller en haut des voies. Mais là, j’ai su bien gérer, aucune erreur et j’étais calé à la perfection. J’ai même pas tremblé et j’étais vraiment confiant dans la fin. C’était vraiment une sensation incroyable de savoir que j’allais enchaîner !
Tu es également très présent en compétitions. Qu’est-ce qui te plaît le plus entre le travail de voie en falaise et la compétition ?
Je n’ai pas vraiment de domaine préféré. Je ne savais même pas si j’allais faire la saison de compétitions quelques semaines avant, puis je me suis lancé. Ça faisait longtemps ! J’adore l’ambiance des compétitions et le petit stress. Mais la récompense d’enchaîner un projet en falaise c’est vraiment top. J’aime bien faire les deux, puis les deux se complètent vraiment bien je trouve!
En ce début de saison, enchaîner ton premier 9a en seulement 5 sessions est très prometteur. Que prévois-tu pour la suite ?
C’est sur que 5 séances c’est pas énorme mais j’ai beaucoup essayé l’an dernier. J’ai pas mal de projets dans les Alpes-Maritimes (un peu toutes les voies dures du coin à vrai dire…) mais je pense me lancer dans « Kinematix » et « Kick Ass », deux 9a dans le secteur de Déversé. Et puis pourquoi pas aller faire quelques trips à Saint-Léger pour aller essayer « Super Crakinette » la saison prochaine !