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Dans l’oeil de l’ouvreur: Mike Fuselier revient sur la Coupe du Monde de Chamonix

Mike Fuselier était l’un des quatre ouvreurs présents sur la Coupe du Monde de Chamonix. Sa mission: tracer les voies de qualification, de demi-finale et de finale, dans le but de départager les grimpeurs. Nous avons souhaité avoir son retour sur cette compétition, où beaucoup de choses se sont déroulées.

Il revient ainsi en exclusivité pour nous sur les conditions météos, l’absence des grands favoris, les nombreux tops dans la voie de demi-finale femme et la façon dont l’équipe d’ouvreurs a travaillé pour tracer toutes les voies de cette Coupe du Monde de difficulté.


« Pour l’ouverture de la Coupe du Monde de Chamonix, nous étions 4 ouvreurs :

  • Marcin Wszołek (POL), le chef ouvreur
  • Florian Murnig (AUT)
  • Vincent DE GIROLAMO (FRA)
  • Et moi

L’entente au sein de l’équipe était parfaite et nous avons travaillé toute la semaine dans une très bonne ambiance. Marcin et Flo se sont plus occupés de l’ouverture de la demi-finale et de la finale homme, Vincent et moi de la demi-finale et de la finale femme.

Nous avons eu une semaine compliquée au niveau météo surtout en début de semaine au moment de tracer les ½ et les finales.

La météo est venue complexifier le travail des ouvreurs.

La phrase de la semaine :  Vincent et moi étions dans la nacelle en haut du mur, en train de visser la voie de finale femme. Marcin, qui faisait une montée de calage dans la voie homme, s’arrête à notre niveau, et, pendu dans son harnais, regarde l’aspect général de la voie des femmes. Il marque un temps d’arrêt et nous regarde en disant (Marcin parle très bien français) : « Elle est pas là Janja… ». Mais Janja n’était pas la seule absente de cette étape. En effet, d’autres têtes de série ont fait le choix de se préserver en vue des J.O qui auront lieu dans un peu moins de 3 semaines. Il fallait donc bien prendre cela en compte pour caler les voies.

Les qualifications se sont globalement bien passées et l’intensité que nous avions proposée était correcte.

Malheureusement avec une météo plus que compliquée, le choix a été fait de faire grimper les ½ finales homme et femme en même temps. Ce qui nous a laissé 2 heures pour démonter toutes les voies de qualif et remonter les deux ½ finales.
Nous étions bien dans le rush et n’avons pas eu le temps de nous poser pour réfléchir aux différentes options de calage qu’on avait dans les voies. La ligne des hommes a bien fonctionné. Mais oui, la voie des femmes était bien trop facile.

Voici notre analyse : En l’absence de quelques habituées des finales, nous pensions proposer une voie qui permette à 2-3 filles de toper la voie. Mais force est de constater que le style physique de la voie ne les a pas vraiment mis en difficulté. Et en plus ce soir-là, contre toute attente, ça collait !! En tant qu’ouvreurs, nous n’avons pas passé un très bon moment, j’imagine que le public non plus et encore moins les grimpeuses.

Il fallait donc rectifier le tir pour les finales et bien sûr procéder à quelques modifications (surtout pour la voie des femmes). Mais toute la difficulté était de faire des changements objectifs sans pouvoir essayer le moindre mouvement (trop de monde qui se baladait sur la place du Mt Blanc). Nous avons donc remonté les finales le matin et pris le temps de décortiquer chaque mouvement en pensant au ressenti que nous avions quelques jours plus tôt en calant ces voies.

Les choix que nous avons faits pour les filles se sont révélés être les bons. Pour les hommes il y avait encore trop de complexité dans cette voie particulièrement intense, et la moindre erreur était fatale. Certains (public) ont particulièrement apprécié ce style de voie et d’autres sont restés sur leur faim.

Pour conclure: je dirais que l’ouverture n’est pas une science exacte, qu’il faut beaucoup d’expérience et une bonne connaissance des compétiteurs pour proposer une voie cohérente. Qui soit originale, spectaculaire et télégénique. Une voie dans laquelle les grimpeurs/euses peuvent s’exprimer (gabarits) et se faire plaisir (oui, ça compte). Qui ne mette pas les grimpeurs/euses en danger. Que le travail des juges soit pris en compte. Qui puisse créer un classement.

La recette est parfois compliquée, mais si c’est pour sortir un bon gâteau à la fin, ça vaut le coup.

La joyeuse grimpe à tous. »

Mike

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