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L’Art de la dĂ©cotation – Downgrading as an Art form

23 juillet 2022 Ă  10:57

Deux propositions de dĂ©cotation de voies dures en falaise ont rĂ©cemment Ă©tĂ© annoncĂ©es, par Seb Bouin et Malik Schirawski, ce qui nous a conduit Ă  nous poser des questions sur le “pourquoi faut-il dĂ©coter” quand une voie est jugĂ©e facile pour le niveau. Tentative d’éclaircissement sur comment le grimpeur doit prendre des pincettes avec la gestion de la cotation quand il mĂ©diatise ou rend publiques ses performances.

Tout aurĂ©olĂ© aprĂšs l’ouverture de “DNA” dans le Verdon ce printemps – qu’il a annoncĂ© Ă  9c -, Seb Bouin est de retour Ă  Flatanger sans rĂ©el objectif particulier. Le grimpeur pro français vient tout de mĂȘme de rĂ©aliser la premiĂšre rĂ©pĂ©tition de “Iron Curtain”, une ligne courte ouverte en 2013 par Adam Ondra que le tchĂšque avait proposĂ©e Ă  9b. Pour l’histoire, l’assureur d’Ondra sur l’essai victorieux n’était autre que Seb, qui depuis avait gardĂ© la voie dans un coin de sa tĂȘte. En 14 montĂ©es et 5 jours, la croix est faite et le Français propose de dĂ©coter Ă  9a+ Ă©tant donnĂ© son recours, au contraire d’Adam, Ă  une genouillĂšre, laquelle rend Ă  ses yeux la voie clairement plus facile.

Comme souvent quand il propose une cotation Ă  la baisse, Seb est parfaitement transparent sur la raison de sa dĂ©cote, et cette dĂ©claration fait Ă©cho Ă  plusieurs prises de position de forts grimpeurs, dont Megos, concernant l’augmentation croissante du nombre de dĂ©valuations de voies et blocs en raison de l’utilisation d’innovations technologiques qui ne sont pas souvent communiquĂ©es.

La prĂ©sence de coincements de genoux faisant baisser le niveau d’une voie semble aussi ĂȘtre la raison du rabotage de “Pornographie” Ă  CĂ©ĂŒse, devenue trĂšs Ă  la mode et essayĂ©e alors que les autres 9a de CĂ©ĂŒse sont dĂ©laissĂ©s. Le fort grimpeur allemand Malik Schirawski, qui vient de la rĂ©pĂ©ter en 5 sĂ©ances, nous a contactĂ© rĂ©cemment pour partager un message qui lui semblait primordial :
“L’annĂ©e derniĂšre Ă  CĂ©ĂŒse la voie Ă©tait Ă  la mode, du coup j’ai pensĂ© l’essayer mais je n’avais pas assez de temps. Cette annĂ©e j’espĂ©rais donc m’y atteler et la faire en quelques jours. Pour moi la voie ne vaut clairement pas 9a (Alex Megos, le premier ascensionniste, l’a d’ailleurs dĂ©cotĂ©e aprĂšs l’avoir refaite avec une genouillĂšre). Elle les vaut complĂštement sans genouillĂšre, mais aujourd’hui presque tout le monde en utilise ; il y a un endroit oĂč je peux lĂącher les deux mains, et pourtant mĂȘme sans la genouillĂšre le repos est bon. Or la difficultĂ© de la voie vient de l’endurance requise, parce qu’aucun des mouvements n’est dur, ils sont tous de la mĂȘme difficultĂ©, et donc le repos au milieu aide Ă©normĂ©ment.

À mon sens, cela Ă©corche un peu CeĂŒse parce que par le passĂ©, si tu faisais une voie dure Ă  CeĂŒse cela voulait dire que tu avais rĂ©alisĂ© une voie rĂ©fĂ©rence dans cette cotation (par exemple “Dures Limites”, “Le cadre nouvelle version”). Pour moi, laisser ici une voie qui est facile pour sa cotation (et surtout le neuviĂšme degrĂ©, si spĂ©cial) porte atteinte aux autres voies en 9a de la falaise (“Le cadre”, “LĂŒlĂŒâ€) parce qu’elles sont beaucoup plus difficiles et les gens doivent vraiment s’investir pour les cocher.”

Symon Welfringer Pornographie 9a
Pornographie 9a – Photo : Damien Largeron

Symon Welfringer, dernier rĂ©pĂ©titeur de la voie avant Malik, fier d’annoncer son premier 9a, se sent le premier concernĂ© par ce crime de lĂšse-majestĂ© et tient Ă  tempĂ©rer :
“Certains jugent “Pornographie” plus dure que “le Cadre” et la voie me semble plus difficile que les 8c+ de la falaise. “Pornographie” est pour moi un 9a, je me base sur ce que j’ai pu voir dans les autres voies dans le neuviĂšme degrĂ© que j’ai essayĂ©es, et surtout je prends en compte qu’au sein d’une seule et mĂȘme cotation il y a forcĂ©ment certaines voies plus dures que d’autres, suivant le style qu’on affectionne et le type d’effort que la voie propose. Ainsi, au sein de la case 9a, je pense que “Pornographie” a bien sa place, elle est pour moi lĂ©gĂšrement plus facile que “Le Cadre” mais aussi plus dure que d’autres 9a que j’ai essayĂ©s. J’ai Ă©galement discutĂ© de cette difficultĂ© avec beaucoup d’autres grimpeurs et ce chiffre me semble juste. Actuellement dĂšs qu’on a le sentiment que c’est soft on pense dĂ©cote alors qu’on pourrait juste accepter que les cotations sont des intervalles. AprĂšs, ce dĂ©bat vaut pour toutes les voies de la planĂšte, notamment certains 9a espagnols qui mĂ©riteraient une plus ample enquĂȘte (ndlr : ou d’autres faciles pour le niveau : “Sang Neuf”, “La Cabane au Canada”, “Era Vella”
).

Parfois aussi, les dĂ©cotations sont proposĂ©es car de nouvelles sĂ©quences ou prises ont Ă©tĂ© utilisĂ©es, ou car le rĂ©pĂ©titeur juge l’effort moins ultime que les prĂ©cĂ©dents ascensionnistes, rĂ©pĂ©tant la voie trĂšs vite par rapport Ă  d’autres itinĂ©raires du mĂȘme niveau, ce qui a poussĂ© par exemple Stefano Ghisolfi Ă  dĂ©coter “Bibliographie” l’étĂ© dernier, s’étant investi pour la faire Ă  Ă©gale proportion que pour d’autres 9b+ comme “Change” ou “Perfecto Mundo”. On retiendra aussi les premiĂšres rĂ©pĂ©titions de “Akira”, qui ont remis en question le premier 9b mondial, Martinez, Bouin et Fourteau s’accordant sur le 9a. C’est le jeu quand on essaie seul une voie lors d’une premiĂšre ascension : on n’est pas Ă  l’abri de passer Ă  cĂŽtĂ© de mĂ©thodes plus faciles. Et puis bien Ă©videmment rentrent aussi en compte les conditions de rĂ©alisation, l’état de forme, le cĂŽtĂ© morpho de certains passages, le style proposĂ©, autant de paramĂštres Ă  apprĂ©hender afin de se poser la question du niveau objectif de ce qu’on a grimpĂ©. Art difficile quand les cotations sont basĂ©es sur un consensus de ressentis subjectifs
 et que l’on est grimpeur pro soumis Ă  la pression de rĂ©sultat par les sponsors, avec un intĂ©rĂȘt Ă  faire parler de soi rĂ©guliĂšrement en matiĂšre de haute-difficultĂ©, quitte Ă  esquiver toute dĂ©marche intellectuelle logique sur le niveau rĂ©el des performances rĂ©alisĂ©es (mĂȘme si, nous le reconnaissons sans mal, toutes les analyses du monde ne rendront pas totalement “objective” une proposition par nature individuelle).

Seb Bouin dans Akira dans la grotte de Vilhonneur
“Akira”, premier 9b mondial, dĂ©cotĂ© Ă  9a 25 ans aprĂšs

C’est justement le cheval de bataille de Lucien Martinez, rĂ©dacteur en chef chez Grimper, grimpeur passionnĂ© et grand amateur de dĂ©bats concernant la haute-difficultĂ© et les cotations.
“C’est tout Ă  fait logique qu’il y ait plus souvent des dĂ©cotes que des recotes parce qu’en gĂ©nĂ©ral c’est liĂ© Ă  des mĂ©thodes plus faciles qui sont trouvĂ©es. Dans l’autre sens ça ne marche pas : si tu fais une mĂ©thode plus dure que la mĂ©thode d’ouverture, c’est tant pis pour toi, ça va pas changer la cote. En gros, le seul moyen pour qu’il y ait une recotation Ă  la hausse c’est que le premier ascensionniste ait sous-estimĂ© le niveau (ou alors une prise qui casse mais c’est plus vraiment la mĂȘme voie). Alors que pour une dĂ©cote il peut suffire d’une nouvelle mĂ©thode ou d’un repos genou. Donc c’est logique et normal qu’il y ait beaucoup plus de dĂ©cotes. Mais attention, une nouvelle mĂ©thode n’est pas synonyme de dĂ©cote du tout, parfois cela rend le truc un poil plus facile mais ça change pas le niveau. Il faut jauger Ă  chaque fois.
Il me semble important de signaler que dĂšs lors qu’on communique sur nos performances ou que nos performances intĂ©ressent les gens, je pense qu’il y a un devoir Ă©thique de s’imposer une petite rĂ©flexion sur la cotation. Par honnĂȘtetĂ© envers tous ceux qui s’y intĂ©ressent de prĂšs ou de loin. J’ai remarquĂ© aussi que mĂȘme si on essaie de rĂ©flĂ©chir lĂ -dessus, le cerveau humain est tellement fort pour l’auto-persuasion qu’à de trĂšs trĂšs rares exceptions prĂšs, quand il y a des doutes, on trouve toujours le moyen de prendre la cotation qui nous arrange. Moi je me suis dĂ©jĂ  surpris en train d’échafauder un raisonnement en sachant dĂ©jĂ  Ă  quelle cotation cet argumentaire devait me mener
 Les cotations, c’est trĂšs imparfait comme systĂšme, il y a des dĂ©rives, ça dĂ©tourne la puretĂ© de la pratique et ça a plein de dĂ©fauts. Mais Ă  mon avis tout ça n’est pas trĂšs grave. En fait ça fait partie de notre culture et mĂȘme ça contribue Ă  sa richesse. Je pense qu’il ne faut pas renier les cotations, au contraire, mais il faut rester lucide sur leurs imperfections, relativiser et avoir du recul sur leur importance pour ne pas se faire manger le cerveau.

Les cotations d’antan, plus solides ?
NĂ©anmoins, l’ancienne garde estime Ă©galement que les cotations d’antan Ă©taient plus serrĂ©es que celles proposĂ©es par la jeune gĂ©nĂ©ration, qui tourne peut-ĂȘtre moins rĂ©guliĂšrement sur caillou en raison de l’omniprĂ©sence de salles et a du coup nettement moins d’expĂ©rience en milieu naturel, et de rĂ©fĂ©rences pour proposer une cotation lĂ©gitime. C’est par exemple ce que soulevait Alex Huber dans ce laĂŻus consacrĂ© Ă  “Action Directe” :
“Jusqu’en 1995, “Action directe” Ă©tait considĂ©rĂ© comme Ă©tant du 8c+ (ndlr : 11 UIAA, soit 8c+/9a) . Depuis, la cotation est devenue confuse, et cela a principalement Ă©tĂ© dĂ» Ă  la proposition de cotation 9b [i.e. pour Akira]. Ben Moon a essayĂ© de convaincre la communautĂ© que la proposition de cotation 9b Ă©tait nĂ©faste du fait qu’il n’existait pas alors de 9a confirmĂ© dans le monde. Mais la rigueur s’est perdue de façon durable. À partir de 1995, la cotation est devenue de plus en plus facile
 Cela a commencĂ© doucement avec le changement de cotation de “Action directe” de 8c+ Ă  9a. Aujourd’hui, “Action directe” est la plus cĂ©lĂšbre des voies en 9a, ce qui en fait la rĂ©fĂ©rence pour ce niveau. Le plus amusant est qu’aujourd’hui, “Action directe”, qui Ă©tait initialement 8c+, est l’une des voies en 9a les plus dures du monde ! Cela montre juste Ă  quel point la surcotation s’est dĂ©veloppĂ©e au cours des annĂ©es – je pense que 90 % des voies modernes de haut niveau sont largement surcotĂ©es si on les compare Ă  la rĂ©fĂ©rence qu’est “Action directe”. En ce qui concerne mes rĂ©alisations personnelles, la surcotation a eu quelques effets : la plupart de mes ouvertures de ces annĂ©es-lĂ  ont Ă©tĂ© recotĂ©es Ă  la hausse, notamment “Weisse Rose”, de 8c+ Ă  9a/9a+, et “Open Air” de 9a Ă  9a+. GrĂące Ă  cela, “Open Air” (et peut-ĂȘtre mĂȘme “Weisse Rose”) est devenue la premiĂšre voie confirmĂ©e en 9a+. “

En effet, les standards actuels d’une cotation sont souvent les voies historiques, souvent dĂ©laissĂ©es par les jeunes pour leur style old-school et souvent retors comme les voies de Huber, “Hubble” (maintenant davantage refait aprĂšs l’apparition d’un genou Ă  l’entrĂ©e du crux), “Open Air”, “Weisse Rose”, “OM”
 Mais cependant difficile de confirmer ou d’infirmer, car les voies old school Ă©taient gĂ©nĂ©ralement plus Ă  doigts et techniques mais moins exigeantes physiquement et longues. Il est cependant possible que de premiĂšres propositions extrĂȘmes comme celles d’Alex Huber soient plus difficiles pour le niveau, car Ă  l’époque annoncer une lettre ou un plus au-dessus des musts de l’époque ne se faisait pas, Ă  en juger les polĂ©miques qui ont entourĂ© les rĂ©alisations d'”Akira” ou de “Chilam Balam” par exemple.
Il reste cependant aussi les voies iconiques comme les King Lines de Chris Sharma par exemple, rarement soumises Ă  la dĂ©cotation pour la plupart (peut-ĂȘtre hormis “Era Vella” et “El Bon combat”), auxquelles des cadors comme Seb Bouin font souvent rĂ©fĂ©rence comme Ă©talon d’un niveau : “Biographie”, “Jumbo Love”, “Es Pontas”, “FRFM”, “Stoking the fire”
 Des difficultĂ©s Ă  prendre en compte quand on essaie d’y comparer des voies du mĂȘme style.

Alex Huber – Open Air – crĂ©dit : Heinz Zack

L’intĂ©rĂȘt du slash ?
Si on considĂšre les cotations comme des intervalles, sur l’exemple de Symon Welfringer, le slash pour dĂ©finir une borne infĂ©rieure et supĂ©rieure peut avoir son intĂ©rĂȘt afin de se prononcer sur une difficultĂ© en utilisant une Ă©chelle plus prĂ©cise. Mais tous les acteurs ne sont pas d’accord, certains s’accordant Ă  dire que le slash a Ă©tĂ© uniquement introduit historiquement pour dĂ©signer les passages morpho, comme par exemple 6c/7a pour une voie avec un grand mouvement, ce qui voulait dire plus proche du 6c pour les grands et du 7a pour les petits.
Lucien Martinez : “On a l’illusion que le slash va nous sauver dans l’indĂ©cision d’une zone de flou entre deux cotations, mais en fait, le seul truc que la gĂ©nĂ©ralisation du slash va faire, c’est introduire deux fois plus de zones de flou parce qu’il y aura alors deux fois plus de plages de cotations.”

Conclusion
Les cotations font partie intĂ©grante de notre activitĂ©, le nier ou ne pas y accorder d’importance quand on s’intĂ©resse Ă  la haute-difficultĂ© serait mentir, donc le fait de proposer des dĂ©cotations (ou parfois des recotations), bien qu’impopulaire, n’est pas forcĂ©ment un acte mesquin et malveillant. L’escalade extrĂȘme propose de belles voies et de grandes expĂ©riences, de belles leçons de vie et c’est peut-ĂȘtre la chose la plus importante Ă  retenir, au-delĂ  des polĂ©miques et batailles d’égo autour d’un niveau de difficultĂ© donnĂ©. Sonnie Trotter l’avait bien rĂ©sumĂ©, en parlant des cotations anglaises :
“Personnellement, j’ai dĂ©jĂ  assez de mal Ă  comprendre les vagues diffĂ©rences entre 5.12d et 5.13a ou entre R et X, sans parler de ce que “l’estimation globale” peut ĂȘtre pour quelqu’un que je ne connais pas enchainant telle voie Ă  vue. Je commence Ă  me dire que notre esprit d’analyse exacerbĂ© Ă©touffe la belle simplicitĂ© de l’escalade.”
Nous devons nous rappeler que la collecte d’expĂ©riences est plus importante que la collecte de chiffres, car en fin de compte, presque tout ce qui concerne l’escalade est de toute façon subjectif : la taille, le poids, la taille du pied, la taille des doigts, la capacitĂ© mentale, le niveau de force, l’allonge, la dĂ©termination, la condition physique, l’ñge, la combativitĂ©, la tĂ©nacitĂ© et si vous avez ou non un emploi Ă  temps plein ou une famille. Toutes ces choses jouent un rĂŽle Ă©norme dans notre vie quotidienne en escalade et il est facile de devenir obsĂ©dĂ©.

La rĂ©alisation d’une ligne unique est ce qui compte, pas la façon dont vous combinez les lettres et les chiffres Ă  la fin de celle-ci et certainement pas lorsque vous essayez de comparer les uns aux autres. N’oublions pas de cĂ©lĂ©brer la nature unique de chaque ascension.”

Photo de couverture : Seb Bouin Ă  Flatanger dans “Iron Curtain – crĂ©dit: Marco MĂŒller

Seb Bouin dans “Change” part 1 9a+ – Photo: Marco Muller

Recently, the downgrading of two hard lines has been suggested, by Seb Bouin and Malik Schirawski, and it got us wondering about the spicy question: ‘why downgrade?’ when a route is adjudged to be easy for a given grade. Here is an attempt to highlight how careful a climber should be when doing so, especially when s/he spreads the news on social media and publicises their performance.

After sending his big project ‘DNA’ in the Verdon in the spring-which he proposed at 9c- Seb Bouin is back in Flatanger without proper objective, it seems. Nonetheless, the French climber made quick work of two Adam Ondra until-then unrepeated lines, inlcuding that of ‘Iron Curtain’, a short route opened in 2013 by the Czech, for which he proposed 9b. Funnily enough, the belayer on Ondra’s successful try was none other then Bouin himself, and the line stayed with him all these years. In 14 tries and 5 days of work, the Frenchman sent it and suggests a downgrade to 9a+ due to his use-contrary to Ondra-of a kneepad, which for him renders the route a fair bit easier.

As is always the case when he puts forward a downgrade, Seb is very clear about the reason behind it, and his latest announcement echoes a number of calls by some strong climbers, including Alex Megos, to be explicit about the technological advances used when a devaluation of routes or boulders is concerned. The possibility of milking a kneebar seems for instance to be behind the recent downgrade of ‘Pornographie’ in CeĂŒse, which has since gained in popularity even as the other 9a’s of the cliff are rather collecting dust. The German climber Malik Schirawski has just repeated it in 5 sessions, and contacted us to share a message that he feels is essential:

“For me the route is definitely not 9a (also Alex Megos, the first ascensionist, downgraded it with the use of a pad), it for sure is 9a when you do it without a pad but these days most of the people have a pad and with one I could release both hands (also taped to my leg) but even without that the rest is still really good. And the whole difficulty of the route comes from its endurancey nature because none of the moves are hard but they are all roughly the same difficulty, and clearly a rest in the middle helps a lot.
For me it ruins CeĂŒse a bit because in the past if you did one of the harder routes in CeĂŒse it meant that you truly climbed the grade (for example: “Dures Limites”, “Le Cadre Nouvelle”). And now having a route which is really soft for the grade (and also the special 9th grade) damages the other 9a routes (like: “Le cadre”, “Lulu”) because they are way harder and people have to invest more time into them.
“

Symon Welfringer, the last repeater of the route before Malik, and proud to have ticked his first 9a, is one of the first to feel raw about this proposition, and brings in some nuance:

‘Some think that ”Pornographie” is harder than “Le Cadre” and the route itself feels harder to me than the 8c+s of the crag. “Pornographie” is a 9a for me, and for this I draw on the other 9th grade lines I’ve tried, but I also especially take into consideration that within the same grade some routes are harder than others, depending on the style we like and the effort needed. That is why I think that “Pornographie” holds its place among 9a lines, for me it’s a bit easier than “Le Cadre” but harder than some other 9as. I’ve also spoken about this with a lot of other climbers and the grade feels right. These days, as soon as we believe it’s a bit soft we think to downgrade, whereas we could as easily understand grades as spectrums. But in the end, this debate is valid for all the routes in the world, most notably certain Spanish 9as that would merit further questioning (note: as well as other easy 9as such as “Sang Neuf”, “La Cabane au Canada”, “Era Vella” and so on).

Symon Welfringer Pornographie 9a
Pornographie – Symon Welfringer – credit : Damien Largeron

Sometimes, dowgrades are proposed because the next repeaters found an easier beta or found the effort easier than proposed, climbing it quickly compared to other routes of the same difficulty. For example, last summer Stefano Ghisolfi proposed a downgrade of “Bibiographie”, thinking his time investment on it was equal to the ones he put into the working of “Change” and “Perfecto Mundo”. The first repeats of “Akira” and the controversy about the world’s first 9b also come to mind, with Martinez, Bouin and Fourteau claiming they climbed a 9a instead. It’s the game when you’re trying a first ascent alone, you may climb in a sub-optimal way. And of course the conditions for the send are important, as well as the shape of the climber, the possible size-dependency of the line compared to the ape of the climber, a lot of elements to consider when the question of giving an objective grade arises. A difficult art when grades are based on subjective feelings
 And when you’re a pro climber living with a lot of pressure from the expectation of your sponsors, with an interest in creating a buzz around yourself with extreme ascents even if it means skipping a methodical reasoning around the real level of the routes climbed (even if, we recognise it without difficulty, all the analyses in the world won’t render an individual proposition completely objective).

It’s precisely one of the hobbies of Lucien Martinez, editor-in-chief at Grimper Magazine, passionate top climber and adept of debates concerning high difficulty and grading.

“It’s quite logical that there are more downgrades than upgrades because in general it’s related to easier betas found. The other way around is not true: if you do a harder beta compared to the opening one, it’s on you, it won’t change the grade. The only way to get an upgrade is if the first climber underestimated the level (or a broken hold but it’s not really the same route anymore). Whereas for a downgrade, a new beta or kneebar rest may be enough. So it’s logical and normal that there are a lot more downgrades. But be careful, a new beta is not synonymous with a downgrade at all, sometimes it makes the thing a little easier but it doesn’t change the grade. You have to juggle with these every time.
It seems important to me to point out that when we communicate about our performance or when our performance is made public, we have an ethical duty to do some serious thinking about the grade. Out of honesty towards all those who are interested in it from near or afar. I’ve also noticed that even when we try to think about it, the human brain is so good at self-deceit that with very, very rare exceptions, when there are doubts we always find a way to ‘choose’ the grade that suits us. I have already caught myself constructing a line of thinking, already knowing which grade this argument should lead me to
 Gradings are very imperfect as a system, they distort the purity of the climbing and have a lot of flaws. But in my opinion these drawbacks do not matter that much. In fact, it’s part of our culture and even contributes to its richness. I think we shouldn’t deny the grades, but we have to remain lucid about their imperfections, put things in perspective and keep their importance in mind so as not to lose our brains.”

Seb Bouin de l'autre cÎté du ciel 9a
Seb Bouin – De l’autre cĂŽtĂ© du ciel – credit: Julien Nadiras

The grades of yesterday, more solid?
Nevertheless, the old guard also believes that the old grades were tighter than those offered by the younger generation, who may be playing less regularly on rock due to the omnipresence of gyms, and therefore have significantly less experience in actual rock climbing, therefore less references to propose a legitimate grade. This is, for example, what Alex Huber meant in this text, devoted to “Action Directe”:

“And it was up to 1995 that “Action Directe“ was considered to be 8c+. Since then grading became confuse and predominantly it had been created by the proposal of the grade 9b. Ben Moon still was there and he tried to convince the community that the proposal of the grade 9b is destructive as there hasn®t been even a confirmed 9a in the world. But the discipline was lost with a lasting effect. Beginning with 1995, the grading became softer, and softer, and softer
 It slowly began with the change of the grade of “Action Directe” from 8c+ to 9a. Today, “Action Directe” is the most famous of all the 9a-routes and therefore it is the reference for that grade. The funny thing is that today “Action Directe”, which had been 8c+ originally, is one of the hardest 9a-routes in the world!!! It just shows, how far the overgrading went over the years – I guess that 90% of the modern high-end-routes are heavily overgraded if you compare these routes with the benchmark-route “Action Directe”. Regarding my personal climbing track record, the softening of the grading had some effects: most of my first ascents of the years got upgraded and amongst all the others “Weiße Rose” from 8c+ to 9a/9a+ and “Open Air” from 9a to 9a+. Thanks to today®s softer grading, “Open Air” or maybe even “Weiße Rose” became the first confirmed route of the grade 9a+.”

Indeed, the current standards for a given grade are often historical routes, often skipped by young people due to their old-school and often awkward style, like the routes of Huber or “Hubble” (now more often repeated after the discovery of a kneebar at the entrance to the crux), “Open Air”, “Weisse Rose”, “OM”
 However it is difficult to confirm or deny, because old school routes were generally more fingery and technical but less demanding physically and long. It is however possible that the first extreme proposals like those of Alex Huber are more difficult for the level, because at the time announcing a letter or a plus above the last was not done, judging from the controversies that surrounded the first ascents of “Akira” or “Chilam balam” for example.
However, there are also iconic routes such as Chris Sharma’s king lines for example, which are for the most part rarely subjected to downgrading (maybe except “Era Vella” and “El Bon combat”), and to which top climbers like Seb Bouin often refer to as gold standards for a given level: “Biographie”, “Jumbo Love” , “Es Pontas”, “FRFM”, “Stoking the fire”
 Issues to take into account when trying to compare routes of the same style.

The interest of slash grades?
If we consider the grades as intervals like Symon Welfringer, the use of slash grades to define a lower and upper limit can be interesting to decide on a difficulty via a more precise scale. But some climbers disagree, thinking that the slash was only introduced historically to cover morphological passages, such as 6c/7a for a route with a reachy move, which meant closer to 6c for tall climbers and 7a for small ones.
Lucien Martinez: “We have the illusion that the slash will save us from the indecision of a gray area between two grades, but in fact, the only thing that the generalization of the slash will do is introduce twice as many gray areas because then there will be twice as many dimension ranges.”

Conclusion
Grades are an integral part of climbing, to deny it or not to keep importance to it when one is interested in high level would be to lie, therefore to offer downgrades (or sometimes upgrades), although unpopular, is not not necessarily a malicious act. Extreme climbing offers beautiful routes and great experiences, beautiful life lessons and this is perhaps the most important thing to remember, beyond the controversies and ego battles around a level of difficulty given. Sonnie Trotter resumed this, speaking about E-grades:
Personally, I have a hard enough time trying to decipher the vague differences between 5.12d and 5.13a or R and X, let alone what the “combined effort” might be for someone I don’t know to get up the thing, onsight. I’m starting to feel that our over-analytical minds are what’s strangling the beautiful simplicity of climbing.

We need to remember that collecting experience is more important than collecting numbers, because at the end of the day, nearly everything about climbing is subjective anyway; height, weight, foot size, finger size, brain capacity, strength ratio, ape index, determination, fitness, age, survival skills, tenacity and whether or not you have a full time job or a family. All of these things play an enormous roll in our day-to-day climbing life and it’s easy to get obsessed.

The achievement of a unique line is what counts, not the way you combine the letters and numbers at the end of it and certainly not when you try to compare one to the other. Let us remember to celebrate each climb’s unique nature.

Cover pic: Seb Bouin – Flatanger climbing “Iron Curtain – credit: Marco MĂŒller

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Escalade outdoor, quelles priorités dans nos valeurs ? -Outdoor climbing, which priorities in our values?

26 mai 2021 Ă  09:16

(English below)

L’étĂ© dernier, l’Access Fund publiait un article exposant 4 signaux d’alerte, signes de dĂ©gradation de l‘environnement autour des secteurs de grimpe. Un sujet important est ici abordĂ©, souvent Ă©ludĂ© : l’impact du grimpeur et de la frĂ©quentation sur son environnement et, de maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, comment s’inscrit ce dernier dans son espace d’évolution. Notez qu’au Yosemite depuis ce vendredi, il faudra des permis d’accĂšs au site pour les ascensions de plusieurs jours afin de restreindre l’affluence grandissante suite Ă  la notoriĂ©tĂ© des lieux et ainsi de tenter de limiter la prolifĂ©ration des dĂ©chets. Au-delĂ  de la cause environnementale, la curiositĂ© de la communautĂ© envers l’histoire des sites naturels et des itinĂ©raires, les acteurs et topos locaux ou autres Ă©lĂ©ments culturels reprĂ©sentent le ciment inhĂ©rent Ă  la pratique de l’escalade en milieu naturel : on pourrait l’appeler « la culture falaise ».

RabĂąchĂ©es depuis des annĂ©es Ă  travers diffĂ©rents organismes et actions, la prĂ©servation de l’environnement et la prise en compte du contexte liĂ© Ă  la pratique en milieu naturel ne devraient pas ĂȘtre une prioritĂ© de tout grimpeur portĂ© sur l’outdoor, quelque chose inscrit dans son Ă©ducation, ses valeurs, son ADN ?
Nous constatons que les annĂ©es passant, ce sujet primordial devient de plus en plus insignifiant alors qu’il devrait ĂȘtre une prĂ©occupation majeure et centrale, un prĂ©-requis Ă  nos actions et Ă  notre pratique. Sans nous exclure du lot, nous partageons un constat porteur d’inquiĂ©tudes.

L’escalade outdoor devenu produit de consommation, mais une consommation axĂ©e exclusivement sur du plaisir personnel.
Une publication et une image d’escalade en milieu naturel nous amĂšnent Ă  rĂȘver. Les marques l’ont particuliĂšrement bien intĂ©grĂ© et l’utilisent abondamment dans leur communication, y compris dans des publicitĂ©s de mass media. Dans le milieu de l’escalade, les pratiquants les plus douĂ©s sont endorsĂ©s et les exploits des grimpeurs pros soutenus. Le grand public dont nous faisons partie vit au rythme des rĂ©alisations de ses idoles du rocher. À notre tour de nous rendre en milieu naturel le week-end et de pratiquer, cherchant Ă  imiter les dĂ©marches de nos champions, Ă  rentabiliser une journĂ©e par une croix, une sortie, une course
 Ă  profiter un max Ă  travers l’escalade, bref Ă  consommer de la pratique souvent dans une vision trĂšs individualiste et Ă©gocentrĂ©e oĂč seuls nos plaisirs singuliers et la satisfaction affĂ©rente priment. Il est dĂ©sormais assez courant de croiser des cordĂ©es qui ne saluent pas les autres grimpeurs prĂ©sents en arrivant Ă  la falaise, qui n’ont pour connaissance des lieux que les passages qu’ils cherchent Ă  gravir, voire qui grimpent uniquement sur les dĂ©gaines en place laissĂ©es dans les voies dures surplombantes. Quant aux problĂ©matiques inhĂ©rentes Ă  l’espace de pratique comme l’état de l’équipement, la question de son subventionnement, la saletĂ© ou le caractĂšre bruyant du pied de voies, l’existence d’acteurs locaux qui ont ƓuvrĂ© pour notre bien-ĂȘtre, l’histoire et la construction de la renommĂ©e du site
 On n’en a que faire! Est-ce un problĂšme d’éducation ? Pas forcĂ©ment
 C’est aussi une question de mentalitĂ© : il s’agit de consommer coĂ»te que coĂ»te et de prendre du plaisir en pleine nature dans une logique hĂ©doniste et assez individualiste. À chaque bonne fenĂȘtre mĂ©tĂ©o, nous sortons en horde sur les secteurs Ă  la mode souvent mis sous le feu des projecteurs par des rĂ©alisations extrĂȘmes et nous consommons du caillou sans nous poser de questions, comme certains poussent leur caddie dans les galeries des centres commerciaux le samedi aprĂšs-midi. L’esprit de cordĂ©e et la fraternitĂ© au pied des sites tend Ă  se perdre au profit d’une massification et d’une logique de consommation trĂšs insouciante autour de sa pratique. La notion de partage des annĂ©es 80 s’est progressivement estompĂ©e. Alors soit, il est plus facile de voyager loin et nous sommes bien plus nombreux Ă  grimper qu’avant, et aussi surement plus nombreux Ă  vivre en zone urbaine oĂč les codes du vivre ensemble en pleine nature sont moins intĂ©grĂ©s, mais le cĂŽtĂ© grĂ©gaire de notre activitĂ© autour de valeurs communes et du respect de notre espace de pratique tend Ă  s’effriter, mĂȘme si le tableau n’est jamais si noir qu’on le pense.

Seynes au crépuscule

Une consommation escalade outdoor toujours tournée vers la culture du moins cher.
Pourquoi dormir Ă  l’arrache et faire risquer une interdiction quand nous avons les moyens de prendre un hĂ©bergement ou d’aller au camping Ă  cĂŽtĂ© de nos spots prĂ©fĂ©rĂ©s ? Pourquoi gratter des infos parcellaires sur la falaise squattĂ©e sans en acheter le topo ? Pourquoi rarement donner un coup de pouce financier ou bĂ©nĂ©vole Ă  des organismes qui s’impliquent dans la gestion de nos sites naturels prĂ©fĂ©rĂ©s, nous permettant ainsi de pĂ©renniser notre pratique dans le futur ? Pourquoi ne pas passer une journĂ©e de repos Ă  ramasser des dĂ©chets et entretenir nos sites de pratique qu’on frĂ©quente assidument tous les week-ends? La consommation escalade est rĂ©solument spĂ©ciale. D’un cĂŽtĂ© la plupart d’entre nous sommes capables de dĂ©bourser des centaines d’euros pour des vĂȘtements de grimpe dernier cri, le nec plus ultra du matos, des aliments bio, un abonnement en salle privĂ©e, le burger et la biĂšre qui va avec, des outils d’entrainement parmi les plus pointus
 D’un autre cĂŽtĂ© nous ne faisons pas rĂ©ellement tourner l’économie locale lors de notre prĂ©sence dans les milieux naturels, et de maniĂšre gĂ©nĂ©rale nous donnons trĂšs peu de nos pouvoir d’achat, temps libre et Ă©nergie pour protĂ©ger notre environnement et les endroits oĂč nous aimons rĂ©guliĂšrement nous rendre. Un paradoxe et un pied de nez aux acteurs locaux qui Ă©voluent dans l’anonymat le plus complet, que ce soit collectivitĂ©s ou grimpeurs locaux. Souvent livrĂ©s Ă  eux-mĂȘmes, ces acteurs se battent au quotidien pour faire perdurer notre activitĂ©, parfois menacĂ©e par les comportements irresponsables et Ă©goĂŻstes d’une frange de notre communautĂ©. Difficile d’ĂȘtre fĂ©dĂ©rĂ© et pris au sĂ©rieux ensuite : le grimpeur est souvent perçu comme un nuisible ou un fantĂŽme, et non comme un touriste qui peut apporter une plus-value au niveau local. Partant de ce postulat, nous avons du mal Ă  voir un avenir radieux pour le tourisme vertical.

dégaine Seynes

La culture de la performance et l’exploit personnel souvent au cƓur des prĂ©occupations. Est-ce une des limites de l’escalade sportive ?
L’escalade est un sport individuel avec une prestation destinĂ©e Ă  ĂȘtre vue. Chaque pratiquant Ă©volue avec un but bien prĂ©cis, une voie ou un bloc Ă  tenter, un projet Ă  continuer ou Ă  finir, un relais Ă  clipper, un passage Ă  franchir
 Il est prĂȘt Ă  tout pour rĂ©ussir dans son entreprise et tenter de repousser ses limites, viser plus haut. Il se fixe des objectifs personnels Ă  atteindre. Outre quelques artifices dĂ©jĂ  abordĂ©s dans le passĂ©, nous voyons que la culture de la performance est dĂ©sormais souvent primordiale dans notre milieu et que cela est en train de s’accentuer Ă  travers l’apparition des rĂ©seaux sociaux et de la mĂ©diatisation immĂ©diate et facile qui leur est propre. En tant que mĂ©dia qui relaye les performances en milieu naturel, il est indĂ©niable que nous avons notre part de responsabilitĂ© dans cette tendance.
La pratique indoor, Ă  travers l’explosion du bloc en salle et de la compĂ©tition, accentue aussi cette culture du champion et de l’exploit personnel Ă  tout prix. Les trĂ©pieds et smartphones remplacent les pareurs derriĂšre les crashpads, le ventilateur et la grimpe nocturne se substituent aux conditions Ă  l’heure du rĂ©chauffement climatique, des live Instagram commentĂ©s sont Ă©tablis pour rĂ©aliser des performances, chaque mouvement est photographiĂ©, filmĂ©, diffusĂ© : la recherche de reconnaissance suite Ă  nos rĂ©alisations atteint son paroxysme
 L’ùre de la performance est de plus en plus marquĂ©e, estompant souvent complĂštement le contexte autour : la culture et l’histoire de notre activitĂ©, les informations sur le passage, les diffĂ©rentes mĂ©thodes ou variantes, les infos concernant la falaise frĂ©quentĂ©e et toute l’éducation et les prĂ©cautions Ă  prendre autour des aspects environnementaux. Idem dans la pratique loisir oĂč le pratiquant, sans forcĂ©ment chercher la performance, recherche son bonheur personnel Ă  travers un maximum de pratique dehors et de sorties, oĂč avec insouciance il ne se pose pas rĂ©ellement de questions autour de sa pratique et de comment apporter sa pierre Ă  l’édifice. Et quid de notre bilan carbone ? Nous semblons avoir le doigt pris dans un engrenage, et mĂȘme si certaines marques, associations ou grimpeurs cĂ©lĂšbres s’investissent ça et lĂ  dans des projets environnementaux ou culturels particuliĂšrement pertinents et novateurs autour de la prĂ©servation et de la promotion des espaces naturels, ces aspects nous semblent marginalisĂ©s de nos prĂ©occupations actuelles.

Des valeurs à réaffirmer ?
Les traits de magnĂ©sie fleurissent, les bouts de Strappal et les bouteilles s’accumulent, les chemins se creusent, les prises se patinent, la vĂ©gĂ©tation s’estompe, les pieds de secteurs deviennent rĂ©guliĂšrement bruyants et bondĂ©s, les ancrages vieillissent et sont parfois dangereux, tout cela dans la quasi-indiffĂ©rence de notre communautĂ©. Les Ă©quipeurs sont souvent critiquĂ©s pour un point mal placĂ© mais jamais remerciĂ©s et reconnus pour leurs chefs d’Ɠuvre, les topos locaux—source de financement local—ne font plus recette et sont Ă©puisĂ©s ou dĂ©suets, les acteurs locaux sont rarement mis en avant, les histoires des sites et les enjeux autour des terrains de jeux sont mĂ©connus ou ignorĂ©s, l’éthique autour des performances et les maniĂšres de rĂ©aliser un passage passent Ă  la trappe au profit de la rĂ©ussite Ă  tout prix et de la mĂ©diatisation de la croix, quitte Ă  gravir une sĂ©quence qui n’a rien Ă  voir avec l’esprit et la difficultĂ© originels. Un sentiment d’impuissance se dĂ©gage. A ce rythme lĂ , quel avenir et patrimoine allons-nous lĂ©guer aux prochaines gĂ©nĂ©rations ?
Notre sport, qui Ă  l’origine Ă©tait trĂšs largement communautaire, oĂč chacun Ă©tait respectueux du terrain, curieux de comment Ă©voluait l’autre, tend de plus en plus Ă  se massifier et s’individualiser. L’esprit de cordĂ©e se traduit parfois juste par trouver un assureur pour aller pratiquer lĂ  oĂč on en a envie, un partage d’intĂ©rĂȘt communs. On peut certes replacer cette Ă©volution dans le contexte plus gĂ©nĂ©ral d’individualisme contemporain ou de conception de l’individu comme auto-entrepreneur de lui-mĂȘme, dont l’unique but serait la maximisation de ses performances et non sa participation Ă  la construction d’une histoire collective. Cet aspect communautaire de l’escalade outdoor qui tend doucement Ă  disparaĂźtre est pourtant sans doute l’unique force qui pourrait nous permettre d’aborder sĂ©rieusement les problĂ©matiques environnementales mais aussi juridiques, avec le dĂ©conventionnement des falaises en France et le flou juridique actuel en cas d’accident, mais aussi de continuer Ă  construire l’histoire de notre activitĂ© Ă  travers des valeurs communes.
Nous devons Ă©galement tous repenser Ă  l’importance de notre impact environnemental Ă  travers notre pratique et placer ce facteur au centre de nos prĂ©occupations, en parallĂšle de notre plaisir personnel. Une implication de tous dans ce domaine est nĂ©cessaire, d’autant plus avec la massification des pratiquants et l’arrivĂ©e prochaine des Jeux Olympiques. On pourrait envisager des actions de sensibilisation aux bonnes pratiques, une journĂ©e nationale de nettoyage des sites naturels comme le Yosemite Facelift, des actions de rĂ©Ă©quipement et d’entretien des sites, des actions de promotion d’une Ă©thique et d’une culture commune autour de festival des grimpe. On vous invite d’ailleurs Ă  y rĂ©agir et Ă  nous insuffler des idĂ©es d’initiative si vous en voyez ! L’importance de la prĂ©servation et de la gestion des sites naturels nous semble impĂ©rative en cette pĂ©riode de popularisation de l’activitĂ©, et si le tableau dressĂ© dans cet article peut paraĂźtre relativement sombre et pessimiste ou sans rĂ©elle alternative et force de proposition nous espĂ©rons qu’il incitera a minima Ă  la rĂ©flexion et Ă  la prise de conscience.

Photo de couverture : Hadrien Perrot

Last summer, Access Fund published an article outlining 4 warning signs of environmental degradation of and around climbing areas. An important subject is at stake here, often overlooked: the impact of the climber on and attendance to his environment. Note that since Friday this week, access permits to the Yosemite national park will be needed for climbs lasting several days, in order to limit the growing affluence following the area’s fame, and thus limit – among other things – the proliferation of waste. Beyond the environmental cause, the community’s curiosity for the history of crags and routes, local actors and guidebooks as well as other cultural elements are quintessential aspects of outdoor climbing: we may even call it “the rock climbing culture”.

Rehashed for years by different organizations and actions, the preservation of the environment and the taking into account of the context linked to the practice of climbing in natural environments, should these not be a priority of any climber focused on the outdoor, something about their values, even DNA?
It is easy to see that as the years go by, this crucial subject loses its significance in the eyes of many when it should be a major concern, a prerequisite to our actions and practices. Without excluding ourselves from the lot, we hereby share a few observations and worries.

EL cap
Photo: Marie Pebble

Outdoor climbing has become a consumer product, an activity focused exclusively on personal pleasure.
An image of climbing in a natural setting makes us all dream. Brands have realised it and use those extensively in their communication, including in mass media advertisements. In the climbing world, the most talented athletes are endorsed and the exploits of professional climbers supported. The general public, to which we belong, lives to the rhythm of the achievements of its rock idols. When it’s our turn to go into the natural environment at weekends, we try to imitate our champions, to make the most of the day with a tick or two
 In short, to practice often in a very individualistic and egocentric way, where only our own pleasures and the related satisfaction prevail. It is now quite common to find that some climbers do not greet others when arriving at a cliff, who only have informations about the lines they want to climb, or who even climb only on the quickdraws left in place in the overhanging hard lines, forgetting about anything else.

As for the problems inherent to our practice such as the state of bolts, the question of maintenance funding, the dirt or the music at the foot of the crags, the local actors who have worked their socks off for our delight, the history of the cliff and so on: we don’t care! Is it an educational problem? Not necessarily
 It’s also a question of mentality: a question of consuming for consuming’s sake and taking pleasure in nature through an hedonistic and quite individualistic prism. At every good weather window we go in troves to fashionable sectors often put in the spotlight by extreme achievements, and we consume the rock without asking anything, as others push their trollies in serpentine shopping centers on Saturday afternoons. The spirit of the rope team and the fraternity at the crags tend to be lost in favor of massification and a logic of very carefree consumption. The notion of sharing prevalent not so long ago has gradually faded from the climbing community. Sure, it is easier to travel far and wide, and there are many more climbers than before. Besides, climbers are more likely to live in urban areas where the codes of living together in nature are less present and less known, therefore the gregarious aspect of our activity around common values ​​and respect for our crags tends to crumble, even if the picture may not be as dark as ones thinks.

Antoine Le Menestrel - Buoux
Photo: Benoit Regord – AIR libre

Outdoor climbing consumption often angled towards the culture of the “less expensive”.
Why sleep everywhere and risk a ban when we can afford to find accommodation or go camping next to our favorite spots? Why try to find free information about the crags without buying the topo? Why rarely give a financial boost or helping hand to organisations that are involved in the management of our favorite places, and who allow us to perpetuate climbing for the future? Why not spend a day-off picking litter up and cleaning the climbing areas where we go every weekend? Climbing consumption is something particular. On the one hand most of us are able to shell out hundreds of dollars for the latest climbing clothes, the ultimate gear, organic food, a private gym subscription, the burger and beer that go with a session, even some of the most advanced training tools
 While on the other, we easily forget to ‘invest’ in the local economy around our chosen crags, and in general give very little of our purchasing power, free time and energy to protect our environment and the places we regularly like to go to. A paradox and a snub to local actors who operate in complete anonymity, whether communities or local climbers. Often left to their own devices, these actors fight every day to help our activity continue on, sometimes threatened by the irresponsible and selfish behavior of a part of our community. Difficult, then, to be federated and taken seriously: the climber is often perceived as a pest or a ghost, not as a tourist who can bring real added value at the local level. Based on this premise, we find it difficult to see a bright future for climbing tourism.

Dave Graham 9b Ali baba cave Rodellar

The culture of performance and personal achievement often at the heart of concerns. Is this the one limit of sport climbing?
Climbing is oftentimes conceived of as an individual sport with performance meant to be seen. Each climber has a specific goal, route or boulder in mind, a project to keep working on or finish, an anchor to clip
 They are ready to do anything to succeed in their endeavour and try to push their limits, aim higher. They set personal goals. In addition to some of the tricks already discussed in the past, we notice that the culture of performance is now often essential in our community and that this is becoming more pronounced with the appearance of social networks and the immediate and easy media coverage now available to them. As a website that mostly covers performance in natural areas, it is undeniable that we have our part of responsibility in this trend.
Indoor climbing, through the explosion of indoor gyms and competitions, also promotes this ‘champion’ culture and personal achievement whatever the cost. Tripods and smartphones replace the spotters behind the crashpads, the fan and night climbs compensating for weather systems at a time of global warming, Instagram lives are set up to broadcast the performances of a growing number
 Each movement is photographed, filmed, shared: the search for recognition is forever reaching its highpoint
 The era of performance is more and more marked, often completely skipping the surrounding context: the culture and history of our activity, information about the climb, the different existing betas or variants, infos about the cliff and all the education about and precautions to be taken surrounding the environment. It’s actually the same way when the climber doesn’t care about his/her performance, when s/he seeks personal happiness through a maximum of outdoor practice and days out. And what about our carbon footprint? We seem to be moving forward heedlessly, and even if certain brands, associations or famous climbers are investing here and there in particularly relevant and innovative environmental or cultural projects around the preservation of natural areas, these aspects seem far away from our concerns.

Saussois Vintage

Values ​​to be reaffirmed?
The tickmarks are legion, pieces of strap, paper and bottles accumulate, the paths widen, the holds are more and more damaged, vegetation disappear, the foot of sectors regularly become noisy and crowded, bolts get old and sometimes prove dangerous, and our community seems not to care. The bolters are often criticised for a misplaced a bolt, but never thanked and recognized for their test pieces; local topos — a source of local funding — no longer make money and become obsolete; local actors are rarely put forward; the history of the crags and the issues surrounding our playgrounds are little known or ignored; the ethics around performance and the ways of achieving a line get lost in the background compared to ethos of ‘success at all costs’ and the media coverage of the send, even if it means climbing a sequence which has nothing to do with the original spirit and/or difficulty. A feeling of helplessness takes hold. At this rate, what kind of future will we leave to the next generations?
Our sport, which originally was very largely community-based, where everyone was respectful of the terrain, curious about how others were doing, tends to become more individualistic. The spirit of the ‘team climb’ sometimes just translates into finding a belayer, any belayer, in order to climb where you want. We can certainly place this evolution in the general context of contemporary individualism and the conception of the individual as a self-made individual, whose own goal consists in the optimisation of his performances and not his participation in the construction of a collective story. This community aspect of outdoor climbing, which is slowly disappearing, is however the only force that could allow us to seriously tackle environmental but also legal issues, with the debacle of the ‘crag question’ in France for example, but also to continue to build the history of our activity through common values.
We must also all think again about the importance of our environmental impact through our practice, and put this aspect at the forefront of our concerns, at least on a par with our personal enjoyment. The involvement of all in this area is necessary, all the more so with the massification of climbing and the imminent arrival of the Olympic Games. We could consider actions to raise awareness of good practices, a national day for cleaning up climbing areas like Yosemite Facelift, actions to re-bolt and maintain crags, to promote ethics and a common culture with climbing festival, so on and so forth. We invite you to let us know about your ideas, and to inspire us with your own initiatives! The importance of the preservation and management of natural areas seem imperative in this time of intense popularisation of the activity, and if the picture depicted in this article may seem relatively gloomy and pessimistic, or without real alternative and force of proposal, we hope that it will at least encourage you to reflect on your practice and impact, and raise your awareness.

Cover pic: Hardien Perrot

El cap by night
Photo: Marie Peeble

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