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Il était une voie – Once upon a line: La rose et le vampire


Derrière tout passage d'escalade, il y a d'abord une ligne, mais aussi des grimpeurs qui l'ont faite naître. Plongez au cœur de passages de légende avec la rubrique "Il était une voie", un état civil de ces itinéraires qui continuent de fasciner des générations et de façonner notre activité !

Behind every route there is a vision, and the climbers who made it reality. Dive into the history of legendary routes with the section “One upon a line”, a sort of ‘Origins’ of these gems that keep on fascinating us generation after generation, and shaping our passion!

La rose et le vampire

   Buoux, Provence, France
    Bout du Monde
  Antoine Le Menestrel, 1985
  Antoine Le Menestrel, 1985

Voie iconique de la falaise de Buoux et du secteur historique du Bout du Monde, théâtre du développement de l'escalade libre en France dans les 80's, "La rose et le vampire" est un véritable mythe, rendu célèbre par son photogénique derviche en guise de crux, mouvement qui aura fait rêver des générations de grimpeurs. Son ouvreur, Antoine Le Menestrel, témoigne.

"J'ai 20 ans, je suis dépressif, je ne suis pas fait pour mes études de biochimie. Mais je grimpe avec la bande des Parisiens, je vie pour grimper. Le soleil tombe au ralentit. Pour arriver à la Rose et le Vampire, j’emprunte un bloc incliné telle une rampe de lancement qui s’ouvre sur le Bout du monde, un lieu magique, théâtre de nombreux combats !

D'imposants blocs de rocher gorgés de soleil jonchent le pied de la voie, de leurs pores émane un parfum sableux aux couleurs désertiques. Sur un gros bloc posé en équilibre, je me prépare. Mon matériel est bien rangé afin qu’en aucune façon il puisse entraver le déroulement de l’ascension. Je m’encorde à mon assureur-complice qui tient ma vie entre ses mains. Au cours de mon élévation il me porte par son attention. D’un geste bleauesque je fais couiner la gomme de mes chaussons. Il me reste à lâcher tout ce brouhaha cérébral et faire le vide. Je rentre en symbiose avec la partition minérale et avec l’air qui alimente le feu de ma respiration.

Je m’élance. Chaque fois, je tombe à quelques mètres du sol. Je me demande ce qui me pousse à réessayer sans cesse. Suis-je là, sur Terre, pour réussir cette voie ? Une vie pourtant ne peut pas se résumer à un mouvement. Toute ma vivacité, toute mon énergie accumulée au cours de la journée se projettent dans cette voie. Je me sens petit. Je n’ai pas le choix, la voie est sculptée en moi.

Après les premiers blocages très physiques, j’atteins les prises du passage clé, un croisé de rêve qui se déroule sur une plaque de rocher ocre ayant la configuration d’un cadre tel d’un écran de cinéma. Je chute toujours les mains aux bords du cadre. Il me manque l’état de grâce que je ne cesse pourtant pas de convoquer.

Peu à peu les ombres s’étirent, il ne reste qu’un dernier rayon de soleil, le spectacle s'achève, les acteurs sont exténués, frustrés. Nous reviendrons demain ou un autre jour, car certains jours nous laissons la voie se reposer.

Cette merveilleuse voie est un vampire. Ses prises me lacèrent les doigts, elles me pèlent la peau et je perds mes empreintes, mon identité ! Ses prises, je les prends comme une tige pleine d’épines pour grimper au calice de la fleur, ma sueur l’arrose. Cette voie m’envahit et je ne pense qu’à elle, je ne désire plus qu’elle. Je suis vampirisé. Cette voie a soif de mon sang pour nourrir sa beauté, je n’existe plus que pour elle.

Ce croisé m’ouvre le visage au monde. Grâce à ce mouvement, je vous offre une rose. Avec vous qui me regardez, je créé une cordée émotionnelle, je deviens un artiste."

 Antoine Le Menestrel

An iconic line from the Bout du monde sector in Buoux, where French free climbing started in earnest in the 80s, "La rose et le vampire" is a route with a mythical status made famous by the photogenic cross involved, a move which gave wet dreams to more than one generations of climbers. The bolter, Antoine Le Menestrel, is here giving us more details. 

I’m 20, depressed, I’m not made for studying biochemistry. But I climb with a group of Parisians, I live for it. The sun is setting in slomo. To get to the Rose et le Vampire, I go up a leaning boulder looking like a launchpad opening onto the Bout du monde, a magical place, the stage of many a good fight!

Imposing sunlit boulders are scattered at the foot of the route, from their pores exudes a sandy fragrance, charged with desert colours. On a big rock sitting in perfect balance, I get ready. My gear is arranged in such a way that nothing can hinder my ascent. I rope up with my belayer-friend, who is holding my life in his hands. During my climb he will keep a close eye. With a Font-like gesture I make my climbing shoes squeak. One thing left to do: let go of the noise and welcome emptiness. I become one with the mineral score and the air that feeds the fire of my breathing.

Off I start. Everytime, I fall a few meters off the ground. I wonder what pushes me to try again and again. Am I here on Earth to send this route? But a life cannot be summed up in one move. All the energy built up throughout the day is projecting onto the rock face. I feel small. I have no choice, this line is etched in me.

After the first very physical lock-offs, I gain access to the holds of the key section, a dream-like cross-through staged on a deep red slab of rock with the semblance of a frame, like a cinema screen. I always fall with my hands on the sides of the frame. I am missing that state of grace that I am fervently calling for.

Little by little the shadows lengthen, only one ray of sunlight, the show is over, the actors are exhausted, frustrated. We will come back tomorrow or another day, for on some days we let the route grab a rest.

This wonderful line is a vampire. Her holds cut through my fingers, they skin them raw and I lose my fingerprints, my identity! Her holds, I grab them like a stem covered in thorns in order to climb up to the calyx of the flower, my sweat waters it. This line has taken me over and it’s all I can think of, all I want is her. I have been vampirised. This line is thirsty for my blood to feed her own beauty, I live solely for her.

This cross-through opens my face to the world. Thanks to it, I offer you a rose. With you who are watching me, I create an emotional team, I become an artist.

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Photo:  Heinz Zack
Témoignage/Account: Antoine Le Menestrel

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Loic Zehani libère une nouvelle voie extrême à Buoux – Loic Zehani frees a new hard line in Buoux

Il y a quelques jours, Loic Zehani a annoncé la première ascension d’un projet au secteur historique du bout du Monde de Buoux avec “Jusqu’au bout du monde” 8c+/9a. Cette ligne juste à gauche du 8a+ classique de “Tabou” avait été équipée par François Legrand et restait invaincue. Voici le ressenti de Loic, qui ne compte pas s’arrêter là concernant les chantiers invaincus de la célèbre falaise du Lubéron…

“Comme je suis allé 2-3 fois dans le “Bombé bleu” mais que je n’arrive toujours pas à faire le premier mouvement, j’ai voulu changer de secteur et je me souvenais que François m’avait dit qu’il y avait un projet au bout du monde. J’étais donc motivé pour voir comment était la voie. Cela m’a pris seulement 4 essais à ma grande surprise mais il faut dire que les conditions étaient très bonnes. C’est une très belle voie où François avait seulement sikaté quelques réglettes pour consolider. Les préhensions sont un peu atypiques pour du Buoux car c’est plus sur des petites réglettes et moins sur des trous. La principale difficulté est condensée sur 13 mouvements de la 3ème à la 6ème dégaine avec deux clippages durs. D’ailleurs juste à gauche de cette voie, j’essaye maintenant un autre projet (qui avait été partiellement équipé par Marc Lemenestrel) qui sera sûrement du même acabit que le “Bombé bleu”, moins aléatoire mais peut-être plus dur. Les mouvements font mais il y en a 23…”

Photo: coll. Zehani

Loic Zehani Buoux

Some days ago, Loic Zehani claimed the first ascent of an old project located at the Bout du monde, Buoux’s historical sector. “Jusqu’au bout du monde” (8c+/9a) is just left to “Tabou” and was bolted by François Legrand, remaining unclimbed. Here are below Loic’s comments, and French crusher doesn’t want to stop now concerning the projects of the famous crag of Lubéron, France…

“I went 2-3 times in “Le Bombé Bleu”, but couldn’t stick the first move, so I wanted to change the sector and I remembered that François told me there was a project in Bout du Monde. So I was curious to see how it was. It surprisingly took me only 4 tries, but the conditions were perfect. It’s a nice line with some edges, not typical here. The main difficulty is between 3rd and 6th bolt, with 2 hard clips and 13 hard moves. Now I’m trying the line just one the left, a project bolted by Marc Le Menestrel, for me the same level than “Bombé bleu”, may be with less low-purcentage moves but may be harder. I arrive to do the moves, but they are 23…”

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Amandine Loury réalise une première féminine à Buoux

Alors qu’elle fait habituellement ses gammes sur la falaise de Saint Leger avec déjà pas mal de croix au compteur, c’est à Buoux cette fois, qu’Amandine Loury est allée serrer quelques prises. Plus précisément, c’est à la baume du Brillant sonné que se situe cette ligne assez récente équipée par Adrien Boulon et déjà répétée par quelques grimpeurs dont, entre autre, Gérome Pouvreau, Manu Lopez ou encore Mathieu Bouyoud. Cotée 8c, il s’agit de la première réalisation féminine. Amandine revient avec nous sur cette nouvelle croix:

Ça y est, je viens à bout du « Saoulé sonné » 8c situé à la baume du Brillant sonné à Buoux. Une voie qui à priori pouvait bien me convenir, car très physique avec des pas durs sur bidoigts et monodoigts. Mais en fait, elle s’est avérée également conti, une filière dans laquelle j’ai des difficultés et que je n’ai pas du tout naturellement. Du coup je suis bien contente d’avoir pu concrétiser ce week end.  Je me suis fait super plaisir en grimpant dans cette voie qui raye la baume de gauche à droite. Et puis ça met la caisse ce gros dévers!! J’espère que ça sera de bonne augure pour la suite.

Le brillant sonné est un vieux secteur dont les premières voies ont été équipées par Graou il y a une vingtaine d’années. Il y en avait seulement quatre à l’époque dont « le Saoulé sonné des bouses hard », un 8b+ majeur pour l’époque au vu de l’ampleur de la ligne. Aujourd’hui, le secteur s’est développé, notamment grâce à Adri Boulon qui a relancé la dynamique d’équipement dans la baume.

D’autres équipeurs s’y sont également attelés par la suite et nous ont permis de grimper dans de nouvelles voies démentes.
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