Symon Welfringer répète Le Voyage – Symon Welfringer repeats Le Voyage
Décidément, la voie de trad la plus dure de France est à l’honneur cette semaine, puisqu’après avoir apprécié la belle vidéo de Barbara Zangerl, c’est le polyvalent guide Symon Welfringer (28 ans) qui vient tout juste de réussir une répétition de la voie. Météorologiste de profession, cet alpiniste passionné n’hésite pas à jouer sur tous les tableaux : Piolet d’Or, expéditions au Népal, au Pakistan, cascade de glace, face Nord de l’Eiger, big wall dans les Dolomites ou au Yosemite, 8c+ à Céüse, fissures à Indian Creek ou Joshua Tree et maintenant une belle coche en trad.
Voici son commentaire laissé sur les réseaux sociaux.
“La tension est palpable, à chaque mouvement, j’ai peur. Pas forcément de la chute, mais cette sensation si particulière aux voies en trad, on lève la tête et rien ne dépasse, pas de dégaines, pas de spits, seulement une fissure évasée, des petits trous pofés, on se sent bien seul.”
C’était un de mes rêves que de gravir une telle voie, la définition pour moi de la beauté de l’escalade : une ligne pure suivant les aspérités naturelles sur 45m, un mur vierge de tout artifice et la nécessité de placer soi-même toutes les protections, plus ou moins solides. Le tout sur un rocher d’une qualité exceptionnelle avec des mouvements incroyables. Que de superlatifs pour un bout de caillou mais c’était une grande émotion de réussir à grimper ce “Voyage”.
Cela fait un bout de temps que j’entends parler de cette voie, d’abord comme un projet extrême dans un endroit glauque—une telle description donnait peu envie et sous-estimait complètement la splendeur de la ligne. En 2017, le maestro du grit James Pearson s’attelle à ce projet et finit par enchaîner ce qu’il appellera “Le voyage”, qui n’est autre que la voie en escalade traditionnelle la plus dure de France. Après son ascension, la ligne reste assez méconnue et n’est que très peu répétée.
Personnellement j’ai attendu un petit temps avant d’essayer ce morceau d’escalade, d’abord par peur de la difficulté mais aussi de l’engagement, la cotation E10 correspond à un engagement conséquent sur des protections parfois mauvaises. En cette fin d’hiver je me sens plutôt en forme et prêt à briser le mythe, d’abord en moulinette.
Après 4 montées de calage je réussis la voie en moul, ce qui paraît être un 8b+ très technique avec une section dure assez courte mais tellement exigeante, en particulier sur la pose des pieds qui sont microscopiques et sablonneux. J’ai pris beaucoup de temps à caler mes méthodes durant les premières montées avec des zippettes incessantes mais au bout de ces premières séances je suis assez confiant, j’ai identifié les différents emplacements de protection et les coinçeurs à utiliser main droite, main gauche, je mets en place ma petite stratégie…
Je tape mon essai, dans la première longueur en 7a, j’ai des sensations horribles, je manque de tomber plusieurs fois. Et étrangement, plus je monte dans la voie, plus je me déleste des quelques coinceurs de mon baudrier, mieux je me sens, plus je me sens libéré. Dans la section crux, tout se déroule comme prévu, gainé et précis, je me rue sur le bac avec un cri victorieux. Mais la voie n’est pas finie, 10m de remontée sur une écaille vibrante où il est particulièrement déconseillé de poser une protection sous peine d’arracher un frigo de grès. Je mets tout de même un friend “mental”, mon dernier point solide et plus de 15m sous moi, les mouvements ne sont plus extrêmes mais il faut rester concentré.
Pour finir, une fissure à verrous de mains/doigts, je donne toute mon énergie dans chaque verrou, sans gants, j’ai la peau en sang, j’appuie encore plus fort.
Et ça y est, le relais me tend les bras, une joie immense s’empare de moi, je lâche mon stress, ma peur.
Je suis heureux.
Me voilà en haut de la voie trad la plus dure de France, et premier Français !
Ce n’est pas la plus dure, mais sûrement la plus belle voie que j’ai eu l’occasion de grimper !
Merci Manon Bérend, assurer dans ce genre de voie est presque aussi stressant que de la grimper !
Et bravo à James Pearson pour avoir ouvert une des plus belles lignes d’escalade que je connaisse.
Merci pour les infos et l’inspiration Ben Guigonnet, à toi de jouer !
Merci à Marc Daviet (photos) d’avoir capturé ces instants magiques.”
Definitely the hardest trad route in France is in the spotlight this week, since after enjoying the beautiful video of Barbara Zangerl, it is the turn of all-rounder guide Symon Welfringer (28 years old) to repeat the line. A meteorologist by profession, this passionate mountaineer isn’t worried about ‘dabbling’ in all disciplines: Piolet d’Or, expeditions in Nepal and Pakistan, ice climbing, North face of the Eiger, big wall in the Dolomites or Yosemite, 8c+ in Céüse, cracks in Indian Creek or Joshua Tree and now a nice trad tick.
Here is his comment left on social media:
“The tension is palpable at each movement, I ‘m afraid. Not necessarily a fall, but this feeling so particular to trad routes, you look up and nothing sticks out, no quickdraws, no bolts, only a large crack, small chalked holes, you feel very alone.
It was one of my dreams to climb such a route, the definition for me of the beauty of climbing: a pure line following the natural asperities over 45m, a wall free of all artifice and the need to place oneself all the protections, more or less solid. All on a rock of exceptional quality with incredible movements. So many superlatives for a piece of rock but it was a great emotion to successfully climb this “Voyage”.
I’ve heard about this route for a while, first as an extreme project in a murky place, such a description gave little desire and completely underestimated the beauty of the line. In 2017, Grit maestro James Pearson went down to this project and ended up doing what he would call “Le voyage” which is none other than the hardest traditional climbing route in France. After his ascent, the line remains relatively unknown with few repeats.
Personally, I waited a while before trying this piece of climbing, first for fear of the difficulty but also of the commitment, the E10 rating corresponds to a substantial commitment on sometimes bad protections. At the end of winter I feel pretty fit and ready to break the myth, first top-rope.
After 4 tries I manage the route in top-rope, which seems to be a very technical 8b+ with a quite short hard section but so demanding, especially on the feet which are microscopic and sandy. I took a lot of time to precise my betas during the first climbs with incessant slip but at the end of these first sessions I was quite confident, I have identified the different gear locations and the friends to use right hand, left hand , I put in place my little strategy…
I did my try on lead, in the first pitch in 7a, I had horrible sensations, I almost fell several times. And strangely, the more I went up in the route, the more I relieved myself of the few piece of gear of my harness, the more I felt good and liberated. In the crux section, everything is going as planned, sheathed and precise, I rush to the ferry with a victorious scream. But the route is not over, 10m of ascent on an unsecure loose flake where it is particularly not recommended to put a gear under penalty of bringing done a sandstone fridge. I still put a “mental” friend, my last solid point and more than 15m under me, the movements are no longer extreme but you have to stay focused.
To finish, a crack with hand/finger locks, I give all my energy to each lock, without gloves, my skin is bleeding, I press even harder.
And that’s it, the anchor reaches out to me, an immense joy is arriving, I let go of my stress, my fear.
I’m happy.
Here I am at the top of the hardest trad route in France, and the first French climber to climb it!
It’s not the hardest, but surely the most beautiful route I’ve had the opportunity to climb!
Thank you Manon Bérend, belaying on this kind of route is almost as stressful as climbing it!
And congratulations to James Pearson for opening one of the nicest climbing lines I’ve been on.
Thanks for the info and the inspiration Ben Guigonnet, it’s up to you!
Thanks to Marc Daviet (photos) for capturing these magical moments.
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