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Soja omniprésent : quelles conséquences pour la santé du sportif ?

Reconnu pour la qualité de ses protéines, le soja est entré progressivement dans les garde-manger pour ensuite coloniser les cantines en remplacement de la viande, y compris dans certaines écoles maternelles. Du côté des sportifs, le soja est un ingrédient devenu quasiment incontournable des compléments alimentaires promettant performance ou meilleure récupération.
Il faut dire que lorsqu’il entre dans la composition d’un complément, son origine végétale est systématiquement mise en avant tandis que le marketing se charge d’indiquer « naturel » et « végétarien », deux termes qui sont fortement connotés « sans danger », voire « santé ».

Pourtant, le soja et ses dérivés sont soupçonnés d’entraîner des perturbations importantes du système endocrinien chez les hommes comme chez les femmes. Dans les années 70, les premières études portant sur le soja se sont focalisées sur sa richesse en isoflavones – qu’on nomme aussi phyto-oestrogènes – et leur intérêt dans la prévention de l’ostéoporose et du cancer du sein.
Cependant, des études complémentaires ont montré que ces composés ont la capacité de bloquer ou favoriser la sécrétion d’œstrogènes en fonction des differents tissus ou organes concern’s, des doses et de l’âge des sujets concernés. En d’autres termes, la consommation de soja a la capacité de perturber le système endocrinien, ce qui a conduit l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) à recommander d’éviter la consommation de soja et de ses dérivés par les femmes enceintes et les enfants de moins de trois ans.

La population générale ainsi que les sportifs sont tout autant concernés par les perturbateurs endocriniens, la recommandation auprès des populations dites vulnérables étant simplement un principe de précaution de base.
L’étude Siepmann et son équipe, parue en 2011 dans la revue scientifique Nutrition met en évidence le lien entre la consommation de grandes quantités de soja et les troubles de l’érection [1]. Une étude plus ancienne, menée par Kalman en 2007 et complétée par les travaux de Borrione publiés en 2012 dans le Journal of the International Society of Sports Nutrition [2], montre que le taux d’oestrogènes est anormalement augmentés chez les sportifs [3] qui consomment des suppléments alimentaires à base de soja. Ce dernier conclut d’ailleurs sur la nécessité d’engager des études à moyen et long terme afin d’en connaître la toxicité et les dommages sur les organes.

En effet, les cancers hormono-dépendants et les anomalies de la fertilité sont des processus longs à se mettre en place, il suffit de se pencher sur le scandale du Distilbène pour en avoir un aperçu[4].
Actuellement, la difficulté d’émettre des préconisations pour toutes les catégories de population provient en premier lieu du mode d’action des oestrogènes et donc des isoflavones, dont l’effet ne peut être prédit qu’en connaissant la dose circulant dans l’organisme.  Les études parlent de la consommation d’une « grande quantité de soja » or il est quasiment impossible d’estimer la teneur moyenne en phyto-oestrogènes des aliments contenant du soja. En effet, la variation peut aller de 1 à 100 entre deux produits issus du même lot de fabrication. En cause : les procédés industriels de fabrication qui réduisent le temps de trempage des fèves de soja.

Le trempage et le rinçage sont des habitudes traditionnelles qui, on le sait aujourd’hui, évacuent les isoflavones. Cela explique d’ailleurs comment les populations asiatiques ont pu consommer du soja pendant des siècles sans problème particulier. Mais actuellement, on peut par exemple retrouver jusqu’à l’équivalent d’un comprimé de pilule contraceptive dans 15 ml (une cuiller à soupe) d’huile de soja, ce qui est loin d’être anecdotique. De plus, la consommation de soja n’est pas forcément aussi évidente que le fait de manger un curry au tofu ou d’ajouter des fèves d’edamame dans sa salade. Parfois la consommation est indirecte, notamment lorsque les animaux qui finissent dans nos assiettes ont été nourris aux tourteaux de soja[5]. En résumé, même un grimpeur non végétarien peut se retrouver avec des doses de phyto-oestrogènes ingérées qu’il ne soupçonne pas.
Raison de plus pour sensibiliser à cette problématique les sportifs qui sont de plus en plus nombreux à se tourner vers des alternatives à la viande ou celles et ceux qui recherchent une amélioration de leurs performances via des compléments alimentaires. Comme souvent, la juste mesure pour limiter les apports en isoflavones est sans doute l’étude attentive de la composition des produits manufacturés pour éviter l’effet cumulatif lié aux dérivés du soja (farine, huile, isolats de protéines, lécithine, etc) utilisés comme additifs ou ingrédients et la consommation d’aliments transformés le plus possible à la maison afin de réserver au soja une place visible sous forme de tofu, yaourt ou boisson et donc plus facilement maîtrisable.

Texte: Amandine Verchère


[1] Hypogonadism and erectile dysfunction associated with soy product consumption, Siepmann et al., Nutrition, 2011

[2] Borrione, P., Rizzo, M., Quaranta, F. et al. Consumption and biochemical impact of commercially available plant-derived nutritional supplements. An observational pilot-study on recreational athletes. J Int Soc Sports Nutr 9, 28 (2012). https://doi.org/10.1186/1550-2783-9-28

[3] L’hormone est présente chez les hommes comme les femmes, seules les quantités diffèrent, ainsi que le cycle de production.

[4] Le Distilbène est un oestrogène de synthèse qui a été beaucoup utilisé pour prévenir les fausses-couches https://www.allodocteurs.fr/actualite-sante-distilbene-des-consequences-sur-trois-generations_15002.html

[5] Voir l’étude menée par Que choisir https://www.quechoisir.org/comparatif-preparations-a-base-de-soja-n67055/

Escalade et nutrition – Arrêt du sport et réconfort : quand le grignoter remplace grimper

Avec la fermeture des salles d’escalade, beaucoup d’entre nous ont perdu leur activité sportive hebdomadaire et avec elle, un précieux défouloir. Si certains ont compensé avec la course à pieds ou le vélo, d’autres se sont retrouvés privés de leur sport favori, sans rien pour évacuer le stress habituel auquel s’ajoute celui de la situation sanitaire. Dans ces circonstances, il n’est pas rare d’entendre les copains se plaindre de tomber dans le chocolat ou le comté à intervalles réguliers, comme si manger devenait le seul moyen d’obtenir sa dose de bien-être.

Lorsque nous sommes soumis à des stresseurs qui génèrent de l’anxiété ou d’autres émotions négatives comme la colère, nous sommes en réalité face à deux types de situation : soit nous pouvons mettre en place une stratégie permettant de résoudre le problème initial, soit il n’existe pas de solution immédiate. Dans ce cas, nous devons recourir à des solutions palliatives pour diminuer notre niveau d’adrénaline et de cortisol. Et avec la pandémie, l’accès à la plupart de nos solutions de réconfort nous est interdit. Chacun d’entre nous possède un répertoire d’activités réconfortantes et quand il n’y a plus de sorties entre amis, plus de cinéma, plus de shopping, plus de concert, plus d’escalade, plus rien, il reste encore la nourriture. Et ce n’est pas grave.

Il faut comprendre que ce lien entre réconfort et nourriture, nous le construisons dès la naissance. Lorsque le bébé passe en quelques heures d’un milieu aquatique, nourri-logé au chaud, lumière tamisée et sons atténués à l’environnement de la salle de naissance, son organisme est soumis à un stress intense. Or dans ses premiers instants, le bébé est aussi nourri, enveloppé dans les bras de sa mère et c’est là que la relation entre nourriture et réconfort se crée.

C’est pourquoi quand on cherche du réconfort et que toutes nos stratégies sont hors de portée, il reste encore le chocolat et le comté. Ou le saucisson. Ou les gâteaux apéro. Ou le quatre-quarts de mamie.

Un aliment réconfortant, c’est souvent un aliment gras et si possible sucré mais surtout, il est indispensable que ce soit un aliment particulièrement affectionné afin d’activer le circuit de la récompense. Ce groupe de neurones cérébraux produisent ainsi de la dopamine et des endorphines…c’est à dire les mêmes neurotransmetteurs que lorsqu’on pratique son sport préféré.

Alors c’est normal d’avoir pris du poids pendant le confinement à cause du grignotage de réconfort ? Oui, et le coeur du sujet n’est pas le nombre de kilos pris. En réalité, le plus important est de savoir si votre relation avec les aliments a changé à cause de cette crise.

L’arrêt brutal du sport n’entraîne pas immédiatement de modification de l’appétit, ce qui fait que la balance apports/dépenses énergétiques est temporairement favorable à la mise en réserve.

Mais si vous êtes un mangeur qui écoute sa régulation naturelle, qui laisse aux aliments leur chance de jouer leur rôle réconfortant Il y a de fortes chances que vous n’ayez pas faim (ou moins faim au repas) suivant un grignotage. De fait, vous ne vous forcez pas à manger et on peut parier que vous retrouverez votre affutage dès la reprise de l’escalade.

En revanche, si en plus d’avoir pris quelques kilos ce grignotage envahit votre mental, si vous vous mettez à table sans faim car « il ne faut jamais sauter un repas » ou bien « je vais manger de la salade pour annuler les rillettes » et surtout, si les aliments ne jouent pas leur rôle réconfortant mais génèrent encore plus d’anxiété, alors votre rapport à l’alimentation n’est plus serein et il vous faudra probablement un peu d’aide pour revenir en arrière.

Texte: Amandine Verchère

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